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Pourquoi un examen de l’OCDE de la réforme de la réglementation?

Les examens sur la réforme de la réglementation ont été conduits dans plus de vingt pays depuis l’adoption en 1997 par le Conseil de l’OCDE du Rapport sur la réforme de la réglementation. Ces examens à caractère multidisciplinaire permettent d’évaluer les progrès réalisés et explorent les liens qui existent entre réformes et performances économiques. La politique de réglementation détermine les modalités selon lesquelles les lois et réglementations sont élaborées, appliquées et mises à jour de manière à maximiser leur efficience et leur efficacité. La politique de réglementation connaît donc un champ d’action très large puisqu’elle contribue à définir les relations entre l’État, la collectivité et l’économie. Ces examens reposent sur des principes définis par l’OCDE en 2005.

Une politique de réglementation s’appuyant sur des structures institutionnelles et des ressources appropriées présente deux avantages essentiels, d’après l’expérience des pays de l’OCDE les plus avancés en la matière: – elle favorise la cohérence par une approche globale, ce qui permet d’agir sur l’ensemble des activités publiques et de couvrir le processus complet d’élaboration des lois et des règles au fil du temps. Les réformes structurelles des secteurs d’infrastructure, par exemple, doivent s’appuyer sur une connaissance précise des limites du rôle du législateur, tandis que les autorités de régulation indépendantes peuvent contribuer à remplir des objectifs de politique publique au niveau sectoriel en termes d’efficience, de sécurité et de finalités sociales; – la politique de réglementation accompagne et appuie d’autres politiques publiques essentielles pour la croissance et les réalisations sociales, notamment dans le domaine de la concurrence, l’ouverture des marchés internationaux, les réformes structurelles ainsi qu’une saine gestion budgétaire et macroéconomique.   Une politique réglementaire efficace est un processus dynamique, qui implique à la fois une re-réglementation et une déréglementation. La déréglementation (élimination des règles inutiles, gênantes, mal conçues, obsolètes et pesantes) est souvent un point de départ, mais pas une fin en soi. Une politique réglementaire efficace implique au besoin un retour à la réglementation et nécessite parfois d’autres approches telles que la reconnaissance mutuelle des règles et des normes à l’intérieur des juridictions nationales et d’un pays à l’autre. C’est le cas, par exemples de l’application du principe du «Cassis de Dijon» en Suisse.

Assurer la cohérence des politiques et la croissance économique


Les travaux entrepris par l’OCDE sur les ressorts de la croissance confirment que les réformes introduites dans le marché des produits, notamment les réformes de la réglementation, favorisent l’activité économique, et peuvent contribuer à une augmentation de la productivité, et donc du taux de croissance à long terme. Il semble qu’il existe en particulier un lien fort entre l’amélioration de la productivité et l’augmentation du taux d’emploi. La facilitation des échanges, la promotion de la concurrence intérieure et la simplification des procédures administratives sont des mesures qui améliorent l’activité économique. En revanche lorsque les obstacles et la complexité des procédures subsistent, les progrès sont lents. Les examens mettent en lumière l’importance et l’étendue des objectifs publics que les pays membres cherchent à atteindre. La réforme de la réglementation n’est pas simplement un instrument permettant d’ouvrir les marchés et d’améliorer les perspectives de croissance économique. Les objectifs économiques des pouvoirs publics y occupent certes une place centrale, mais d’autres préoccupations ayant trait au bien-être, telles que l’équilibre régional, peuvent également être très importantes.

Une approche globale de l’action publique


Les éléments d’appréciation dont on dispose grâce aux examens par pays montrent que les diverses approches, qui contribuent à la qualité de la réglementation, se renforcent mutuellement, ce qui consolide la thèse selon laquelle l’action publique doit être considérée dans sa globalité, dans une optique «d’ensemble du gouvernement»: – les Principes directeurs pour la qualité et la performance de la réglementation del’OCDE accordent une place de choix à la politique de la concurrence, mais l’examen des progrès réalisés souligne la nécessité de faire preuve de réalisme quant à son importance réelle. Il y a encore du chemin à parcourir pour renforcer le lien entre politique de la concurrence et processus de réglementation; – les examens portant sur l’ouverture des marchés reflètent les inquiétudes ressenties devant la façon dont les échanges sont intégrés au cadre réglementaire interne. Certes, les réformes sectorielles se poursuivent, mais elles rencontrent bien des difficultés; – en ce qui concerne le cadre d’élaboration des règles, l’examen a particulièrement porté sur la politique de la réglementation, ses institutions et ses outils, par exemple l’analyse d’impact de la réglementation (AIR). Dans ces trois catégories nécessaires à une gestion efficace de la réglementation, on a visiblement progressé mais de façon irrégulière et l’évolution dans la plupart des pays a été fragmentaire. Elles restent souvent en retrait, par rapport à l’ambition d’une approche «d’ensemble du gouvernement» dans la recherche d’une réglementation de qualité.

Transparence et processus d’apprentissage


Si l’examen des performances nationales comparées montre des convergences quant aux grands objectifs de la puissance publique, il existe également une grande diversité au stade de la mise en oeuvre, celui-ci respectant le cadre institutionnel de chaque nation. Des pratiques améliorées émergent dans de nombreux domaines mais ne sont pas toujours systématiquement adoptées. Les États ont encore beaucoup à apprendre les uns des autres. Bien souvent il apparaît qu’un changement culturel plus poussé et une meilleure communication sont nécessaires pour que l’importance d’une réglementation de bonne qualité soit pleinement comprise. La transparence, appuyée par des efforts destinés à faire participer toutes les parties prenantes, apparaît comme la pierre angulaire d’un processus de réglementation efficace et dynamique, permettant d’obtenir un consensus et d’associer les citoyens à toute réforme. Les travaux présentés ici visent à analyser dans quelle mesure la Suisse peut, comme beaucoup d’autres pays de l’OCDE, trouver les moyens de renforcer sa croissance économique. Les facteurs traditionnels à l’origine de ses performances du passé ne suffisent plus à assurer une expansion soutenue dans le contexte de nouveaux défis, notamment la nécessité de prendre soin d’une population vieillissante ou l’obligation de rester en phase avec les changements structurels et réglementaires qui agitent l’Union européenne (UE). Dès lors, la réforme de la réglementation constitue un instrument multidisciplinaire qui peut offrir un éclairage utile pour évaluer la situation du pays dans une perspective internationale, avec ses atouts mais aussi ses faiblesses relatives. Le but est d’identifier les domaines dans lesquels des actions vigoureuses de modernisation des cadres réglementaires et de stimulation de la concurrence peuvent porter leurs fruits.

Encadré 1: Les principes directeurs de l’OCDE 2005 relatifs à la qualité et à la performance de la réglementation Ces principes traduisent l’approche dynamique et permanente, dans une optique d’«ensemble du gouvernement», de la mise en oeuvre de la qualité de la réglementation. Ils s’inspirent de la Recommandation de 1995 du Conseil de l’OCDE concernant l’amélioration de la qualité de la réglementation officielle, du Rapport de l’OCDE sur la réforme de la réglementation adopté en mai 1997, et sur la série d’études par pays. Les principes directeurs de l’OCDE couvrent les points clés suivants:1. Adopter, au niveau politique, de vastes programmes de réforme de la réglementation comportant des objectifs clairs et prévoyant des cadres précis pour leur mise en oeuvre.2. Évaluer l’impact des réglementations et les réexaminer systématiquement pour vérifier si elles répondent avec efficience et efficacité aux objectifs qui leur sont assignés dans un monde complexe et en mutation.3. Veiller que les réglementations, les organismes chargés de leur mise en oeuvre et les procédures réglementaires soient transparents et non discriminatoires.4. Réexaminer, et renforcer le cas échéant, le champ d’application et l’efficacité de la politique de la concurrence et les moyens de faire respecter les obligations qui en découlent.5. Réformer les réglementations économiques dans tous les secteurs afin de stimuler la concurrence et l’efficience, et les éliminer sauf lorsqu’elles s’avèrent le meilleur moyen de répondre aux intérêts généraux de la collectivité.6. Supprimer les obstacles réglementaires inutiles aux échanges et à l’investissement en poursuivant la libéralisation et améliorer les perspectives d’ouverture et de meilleure intégration des marchés grâce aux procédures réglementaires en vue de renforcer la compétitivité et l’efficience économique.7. Recenser les liens importants existant avec d’autres objectifs de l’action gouvernementale et élaborer des politiques qui permettent de les réaliser en favorisant les réformes.

Proposition de citation: Stephane Jacobzone (2006). Pourquoi un examen de l’OCDE de la réforme de la réglementation. La Vie économique, 01 mai.