Les expériences internationales en matière de modèle des coûts standard et leur intérêt pour la Suisse
Dans de nombreux pays d’Europe, le modèle des coûts standard (MCS) est déjà devenu la méthode éprouvée pour réduire la charge administrative des entreprises. L’idée de base est convaincante: il s’agit d’abord de calculer les coûts correspondants, puis d’en identifier les facteurs responsables pour, ensuite, fixer à l’aide de ces paramètres des objectifs généraux mesurables. L’application peut, en outre, revendiquer des succès durables et chiffrables. Aux Pays-Bas, la charge administrative a pu être réduite de 4 milliards d’euros par an pour l’économie. La cible visée – une réduction de 25% des coûts mesurés – a donc déjà été atteinte. C’est également celle que se sont fixés la plupart des autres États.
En comparaison internationale, la charge administrative de l’économie suisse peut être qualifiée de relativement faible. En l’évaluant à environ 2% du produit intérieur brut (PIB), soit à peu près comme au Danemark, une réduction de 25% signifierait un gain de 2 milliards de francs pour l’économie suisse. De prime abord, l’application du MCS en Suisse semble donc tout aussi intéressante que dans les pays qui pratiquent ou ont déjà pratiqué un mesurage intégral (autrement dit la mesure des coûts de toutes les lois, voir graphique 1). Il reste, cependant, à voir comment le MCS peut être appliqué dans un système fédéraliste et s’il y a fait ses preuves, car on ne dispose jusqu’ici que de peu d’expériences étrangères.
Le MCS est-il applicable dans un État fédéral?
L’applicabilité du MCS dans un État fédéral était l’une des questions centrales examinées dans une étude commandée à la société Rambøll Management par le Secrétariat d’État à l’économie (Seco). Les auteurs se sont surtout basés sur les expériences faites en Allemagne et sur les premières mesures pilotes effectuées par l’UE. Celle-ci est, en effet, confrontée à une problématique très semblable, à savoir le mesurage des coûts résultant des directives européennes. L’étude conclut qu’il est, en principe, possible d’appliquer le MCS dans un État fédéral, mais qu’il faut recourir à une procédure spéciale et tenir compte des échelons chargés de concrétiser et de mettre en oeuvre la législation. Si ce travail présente des défis particuliers, il est compensé par une forte valeur ajoutée. Car le mesurage effectué permet de distinguer clairement qui, de l’UE, de la Confédération, des cantons ou des communes, est la cause de la charge administrative, et de nommer les responsables.
Avantages: transparence, souplesse, exécution décentralisée
On note un effet identique sur le plan horizontal. Le mesurage transversal livre, en effet, des chiffres univoques et désigne clairement les responsables, ce qui permet de dire quels départements peuvent diminuer les formalités bureaucratiques, où et comment. Le système consistant à mesurer les coûts administratifs à l’aide du MCS permet une réduction générale des coûts, avec peu ou pas de pilotage central. Chaque unité administrative peut donc fixer et poursuivre ses cibles en toute autonomie pour réaliser le but commun, soit atténuer la charge de l’économie. C’est là un avantage notable pour la Suisse et son système fortement décentralisé. Ces avantages n’apparaissent, toutefois, qu’en cas de mesurage généralisé; c’est la raison pour laquelle l’étude tend à recommander la saisie intégrale des coûts, surtout au niveau fédéral. Les procédures autrichienne et allemande semblent particulièrement intéressantes pour la Suisse. Elles identifient d’abord les «dopeurs» de coûts, autrement dit les réglementations les plus coûteuses pour l’économie, pour les mesurer ensuite plus en détail. Cette manière de faire est meilleur marché et peut être mise en oeuvre rapidement, si bien qu’après six mois environ, on dispose déjà de données avec lesquelles on pourra élaborer et appliquer des mesures de réduction ciblées. Comme autre option, l’étude signale la procédure suédoise, où l’on ne mesure pendant deux ou trois ans que les domaines réglementés qui se sont signalés par leur coût dans d’autres pays. L’avantage d’un pilotage transversal est certainement moindre dans ce cas et le procédé nécessite, en outre, que le plan de mesurage et de réduction soit décidé à un niveau très général; les coûts de l’opération s’en trouvent, toutefois, abaissés. Dans tous les cas, la première étape d’un mesurage serait d’étudier la méthode et de constituer ou de choisir un manuel décrivant exactement la marche à suivre. En effet, s’il est une leçon que l’on peut tirer de l’expérience des dernières années en matière d’application du MCS, c’est que celle-ci varie énormément et que, dans la pratique, la marge de manoeuvre est vaste: elle dépend des objectifs, de la forme juridique des lois et du système politique. Deux éléments en témoignent: – le nombre de manuels utilisés dans le monde; – les résultats des études qui tentent d’établir un étalon international en se basant sur les données recueillies par le MCS. Il en ressort nettement que la comparaison n’est possible que si l’application de la méthode est fixée de façon uniforme et centrale, que ce soit pour comparer pays et cantons ou droit en vigueur et nouveautés.
Les résultats des autres pays sont-ils utilisables directement?
À part la question du potentiel du MCS et des possibilités de l’appliquer, les auteurs de l’étude examinent l’idée – assez logique, en soi – d’utiliser directement les résultats d’autres pays pour s’économiser des mesurages coûteux. Ils commencent par comparer les «dopeurs» de coûts danois aux formes juridiques qu’ils prennent en Suisse. Il en ressort qu’une grande partie d’entre eux sont les mêmes dans les deux pays – mais la méthode ne permet pas d’identifier toutes les réglementations coûteuses de Suisse. Dans l’idée d’alléger la procédure, on pourrait donc utiliser les résultats d’autres pays concernant les «dopeurs» de coûts pour mieux concentrer les mesurages en Suisse, mais il faudrait de toute façon les compléter par d’autres enquêtes. En dernier lieu, les auteurs étudient la démarche par laquelle les mesures de réduction sont évaluées aux Pays-Bas et si celles-ci pourraient être exploitées pour réduire les coûts administratifs en Suisse. Selon leurs conclusions, les mesures néerlandaises peuvent certainement fournir des impulsions, mais la forme des lois et leur application, ainsi que l’évolution des tendances, sont si différentes aux Pays-Bas et en Suisse qu’une reprise directe n’aurait qu’un potentiel très limité.
Conclusion
L’application du MCS est une idée intéressante pour la Suisse et offre un potentiel élevé, en particulier dans la perspective d’un pilotage à la fois transversal et décentralisé de la réduction des formalités bureaucratiques. Le défi consiste ici notamment à adapter la méthodologie. Il serait instructif de collaborer avec d’autres États fédéraux comme l’Allemagne et l’Autriche.
Graphique 1 «Application du modèle des coûts standard en Europe»
Tableau 1 «Coûts et économies dans les États employant le MCS»
Encadré 1
Pays-Bas 4 4.1 Danemark 2 env. 1.1 Grande-Bretagne 26 env. 11.1 République tchèque Processus interne 0.6
Proposition de citation: Koop, Alexander (2007). Les expériences internationales en matière de modèle des coûts standard et leur intérêt pour la Suisse. La Vie économique, 01. septembre.