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Crise financière: la solution suisse en comparaison internationale

De par son ampleur et sa complexité, la crise financière actuelle est un événement d'une portée tout à fait exceptionnelle. Les mesures prises ces derniers mois à l'échelon des différents États pour soutenir les marchés financiers semblent avoir des effets positifs. Il est apparu que la coordination au niveau international est essentielle pour garantir leur efficacité, même si ces mesures divergent souvent pour tenir compte des particularités de chaque pays. La crise financière fait ressortir l'importance d'une planification fondée sur des scénarios, élaborée suffisamment tôt, et qui permette de dépasser des modèles apparemment intangibles.
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En automne 2007, le grand public a découvert avec surprise et incrédulité comment la chute des prix sur le marché immobilier américain avait entraîné des difficultés financières dans des communes du nord de la Norvège, telles qu’elles avaient été contraintes de réduire l’activité de leurs services publics (par exemple les pompiers) à un minimum. Ces communes situées près du cercle polaire avaient subi des pertes sur des titres qui s’avéraient brusquement dépourvus de presque toute valeur, alors qu’ils avaient bénéficié jusque-là d’une notation de première qualité. Personne n’imaginait, à l’époque, que la crise financière ne faisait que commencer.

Des « subprimes» étatsuniennes à la crise financière mondiale


La crise trouve son origine dans la baisse du prix des maisons aux États-Unis, alors que celui-ci avait auparavant fortement augmenté en raison de l ‘ octroi généreux de crédits et d’intérêts peu élevés. Par la suite, les prix des titres adossés à des hypothèques de moindre qualité («subprimes») ont rapidement chuté et les marchés se sont asséchés. Le problème, pour la stabilité des marchés financiers internationaux, résidait dans le fait que des établissements très développés et opérant sur les places financières dominantes avaient presque tous investi massivement dans de tels produits structurés. Ces titres étaient avant tout utilisés par les banques de crédits hypothécaires aux États-Unis, afin de transférer leurs risques. Pour les investisseurs, ils représentaient une possibilité de diversification intéressante en raison de leurs caractéristiques. Cependant, le formidable essor des produits structurés s’explique surtout par le fait que ceux-ci promettaient des rendements plus élevés que les autres placements situés dans la même catégorie de risques. Or, une bulle spéculative se caractérise justement par le fait que les relations élémentaires entre les risques et les rendements escomptés sont ignorées.   Une fois la chute des prix amorcée, il n’y eut bientôt plus d’acheteurs pour les produits structurés basés sur des hypothèques. En raison de l’effondrement du marché, de nombreux établissements financiers se retrouvèrent détenteurs de grandes quantités de titres de mauvaise qualité, sans prix négociable. Suite à d’importants amortissements et à des problèmes ayant trait à l’évaluation des actifs, il devint difficile de se faire une idée correcte de la qualité de certaines banques. Cette incertitude entraîna une perte de confiance considérable dans les milieux bancaires. Subitement, les établissements financiers refusèrent de s’accorder mutuellement des crédits. C’est dans ce contexte que le 9 août 2007, la Banque centrale européenne (BCE) a garanti pour la première fois le refinancement de diverses banques par une injection massive de liquidités de près de 95 milliards d’euros. Cette date marque le début de l’une des plus importantes crises financières connues à ce jour.   Les actions de soutien coordonnées et réitérées des banques centrales ont permis dans un premier temps d’éviter l’effondrement du système. Elles n’ont toutefois pas amené la normalisation prévue, car les banques accumulaient des liquidités en raison de l’incertitude persistant sur les marchés et évitaient de prêter aux autres établissements. Les tentatives de revitalisation des échanges interbancaires sont donc restées longtemps sans effet. La situation s’est encore aggravée quand, en raison de la poursuite de la crise, les risques de liquidité du début se sont transformés en problèmes de solvabilité pour certains établissements.   Les autorités des places financières ont alors pris conscience du danger. Au sein de divers organes internationaux, les discussions portant sur la nécessité et l’aménagement de mesures supplémentaires se sont très rapidement intensifiées. Dès octobre 2007, les ministres des Finances et les banques centrales des sept principales économies mondiales (G7) ont donné mandat au Forum sur la stabilité financière (FSF) de formuler des recommandations devant aboutir à des mesures concrètes. En avril 2008, le FSF a publié son rapport final Forum sur la stabilité financière, Report of the FSF on Enhancing Market and Institutional Resilience, avril 2008 ( www.fsforum.org ). , à l’élaboration duquel la Suisse a participé. Celui-ci contient un catalogue de recommandations approuvées par consensus et destinées aux autorités, aux organes de surveillance des banques et aux acteurs du marché. Après quelques hésitations, le secteur privé s’est également penché sur le problème. En été 2008, il a élaboré, dans le cadre de l’Institute of International Finance (IIF), un code de conduite pour différents domaines. Ces mesures n’ont cependant pas empêché la crise financière de nettement s’accentuer à la suite de la faillite, le 15 septembre 2008, de la banque américaine d’investissement Lehman Brothers. La balance des paiements de certains pays dut affronter de graves problèmes. Pendant ce temps, la crise s’étendait à des États ne présentant pas de bulle immobilière et commencait à avoir des répercussions négatives sur l’économie réelle.

Mesures de stabilisation en Suisse et à l’étranger


En comparaison internationale, l’économie suisse se caractérise par un secteur bancaire relativement important. À la fin de l’année 2007, les actifs de cette branche totalisaient plus de 4700 milliards de francs, soit plus de neuf fois le produit intérieur brut de la Suisse. Tout aussi remarquable est la concentration dans le secteur bancaire suisse, où les trois quarts de tous les actifs sont détenus par les grandes banques oe uvrant au niveau international.   C’est pourquoi une aggravation de la crise de confiance à l’égard d’une grande banque, due à une détérioration continue des marchés, aurait eu des conséquences considérables pour le système financier suisse et pour l’ensemble de l’économie du pays. En raison du blocage de leurs comptes et de l’interruption de leurs relations bancaires, des ménages et des entreprises n’auraient, par exemple, plus été en mesure d’assurer les paiements et les investissements courants. Cela aurait pu paralyser le système des paiements. De telles perspectives ont mené, le 15 octobre 2008, le Conseil fédéral, la Banque nationale suisse (BNS) et la Commission fédérale des banques (CFB) à adopter un train de mesures destinées à renforcer notre système financier. Au moment où cette décision était prise, la plupart des grandes places financières du monde avaient déjà annoncé des mesures de sauvetage et procédé aux premières interventions étatiques massives.   Le premier événement marquant dans ce contexte de très forte détérioration des marchés a été, à la mi-septembre 2008, la proposition du secrétaire au Trésor américain Henry Paulson de traiter la crise de confiance entre les banques à la racine et de racheter leurs actifs «toxiques» (titres illiquides) pour un montant de 700 milliards d’USD. L’État libérait ainsi les banques d’une charge et recréait simultanément un marché pour ces titres. Le soutien apporté aux banques devait aussi garantir un approvisionnement en crédits suffisant pour satisfaire aux besoins de l’économie. La réaction des Bourses au rejet, dans un premier temps, du plan Paulson par le Congrès le 29 septembre 2008 montre avec quelle nervosité les marchés réagissent aux mesures étatiques: ce fut la plus grande perte enregistrée en un jour à Wall Street depuis 1987.   De son côté, la Grande-Bretagne a annoncé le 8 octobre 2008 un plan de sauvetage pour un montant de 400 milliards de livres. Les priorités des deux trains de mesures initialement adoptés ne sont pas les mêmes. Alors que la Grande-Bretagne a mis l’accent sur la dotation en fonds propres des banques, les États-Unis ont tout misé initialement sur l’achat d’actifs illiquides. Depuis lors, le train de mesures des États-Unis a subi de nombreuses modifications et élargi son soutien à d’autres branches.   On considère généralement que la conception du programme britannique et le plan d’action des pays du G7 (voir encadré 1 Compte tenu de la gravité de la situation, et de la persistance de la spirale baissière des marchés malgré les multiples mesures de sauvetage, les ministres des Finances et les directeurs des banques centrales des sept pays les plus industrialisés (G7) ont décidé le 10 octobre 2008 un plan d’action concerté pour faire face à la crise. Celui-ci prévoit essentiellement une étroite coordination internationale en matière d’efforts de sauvetage. Les États du G7 entendent mettre en oeuvre tous les moyens disponibles pour soutenir d’importants établissements financiers et pour leur garantir un accès aux liquidités et au refinancement. Étant donné les tendances à la libéralisation observées durant plusieurs décennies, il est remarquable que le G7 plaide en faveur d’un approvisionnement suffisant de ces établissements en capital frais tiré des fonds publics. L’objectif consiste à rétablir la confiance, à permettre aux banques de continuer d’octroyer des crédits aux particuliers ainsi qu’aux entreprises et à renforcer la protection des déposants. Ces mesures devront être conçues de manière à protéger les contribuables et à éviter des effets dommageables pour d’autres États. Le plan d’action étant soutenu par le Comité monétaire et financier international (CMFI), c’est-à-dire par l’organe de pilotage du Fonds monétaire international qui compte 185 membres, il jouit d’une légitimité mondiale. Le 7 octobre 2008, le Conseil pour les affaires économiques et financières (Ecofin) précisait déjà dans une déclaration écrite que les gouvernements de l’UE prévoyaient notamment des interventions étatiques directes, visant à empêcher la faillite d’établissements financiers d’importance systémique. Ces interventions devront être décidées en temps utile et avoir un caractère temporaire. En tant que propriétaires de l’entreprise, les actionnaires actuels devront aussi tirer les conséquences de leurs erreurs. L’État intervenant devra de plus être à même d’influer sur la composition des organes de direction. ) ont servi de jalons au train de mesures décidé le 12 octobre 2008 par les pays de la zone euro. Celui-ci prévoit de garantir les engagements interbancaires à une échéance de cinq ans au plus, de mettre à disposition des fonds publics en vue de la recapitalisation du système bancaire et de fixer la garantie minimale pour les dépôts à 5 0 000 euros.

Vue détaillée du train de mesures destinées à soutenir le système financier suisse


En Suisse, la déroute des marchés financiers mondiaux a frappé de plein fouet les deux grandes banques, très engagées sur le marché américain. L’UBS a toutefois été nettement plus touchée que le Credit Suisse. Sa vulnérabilité s’est déclarée au grand jour vers la fin du troisième trimestre 2008: forte augmentation des retraits de fonds de la clientèle, évolution insatisfaisante des résultats et, enfin, importantes positions d’actifs illiquides posant encore problème malgré les mesures d’assainissement prises précédemment.   Comme il n’était pas exclu que l’UBS doive affronter une crise de confiance encore plus grave dans l’hypothèse où la détérioration des marchés se poursuivrait, des mesures propres à renforcer l’ensemble du système s’imposaient. Il s’agissait en priorité de restaurer la confiance à l’égard du marché financier suisse. Les dispositions arrêtées par le Conseil fédéral comprennent les mesures d’urgence visant à soutenir l’UBS, dont la fonction systémique est cruciale pour la place financière suisse, et un renforcement de la protection des déposants. À cela s’ajoutent des mesures d’accompagnement dans le but de prévenir les crises Voir le message du Conseil fédéral concernant un train de mesures destinées à renforcer le système financier suisse, www.efd.admin.ch , rubriques «Documentation», «Législation», «Messages». .

Train de mesures en faveur de l’UBS


Le train de mesures en faveur de l’UBS se focalise sur les problèmes principaux. D’une part, il allège le bilan de l’UBS d’actifs illiquides et, d’autre part, il renforce les fonds propres en mettant du capital à la disposition de l’établissement. Cette double action, qui se situe entre le plan Paulson d’origine et le plan britannique, a l’avantage de lier étroitement les deux axes d’intervention dès le début.   Le premier axe relève de la BNS. Il s’agit de transférer, dans une société à but spécial, des actifs illiquides de l’UBS pour un montant pouvant atteindre jusqu’à 60 milliards d’USD (voir graphique 1 ). Cette société sera dotée par l’UBS d’un capital propre de 6 milliards d’USD au plus et d’un prêt allant jusqu’à 54 milliards d’USD. Cela permettra à l’UBS d’échanger ses actifs illiquides contre des liquidités et de la décharger ainsi des risques qui en découlent. La BNS est dans une meilleure position pour supporter ces risques, car elle a la possibilité d’attendre une reprise des marchés avant de réaliser les actifs concernés.   Le deuxième axe d’intervention, étroitement lié à la reprise des actifs illiquides par la société à but spécial, a pour but d’augmenter les fonds propres de l’UBS. Il consiste en la souscription, par la Confédération, et pour un montant de 6 milliards de francs, d’un emprunt à conversion obligatoire de l’UBS. Ce dernier permet à la banque de doter la société à but spécial du capital propre nécessaire sans devoir grever sa propre base financière. La Confédération, quant à elle, retire un double avantage de l’emprunt à conversion obligatoire: elle bénéficie d’une rémunération équitable et sûre pour son engagement (coupon annuel de 12,5%) et elle ne devient pas copropriétaire de la banque, du moins pas dans un premier temps. Le Conseil fédéral souhaite en effet que la Confédération acquière une participation limitée dans le temps, qu’elle puisse déjà vendre pendant la durée de vie de l’emprunt en réalisant un bénéfice.

Renforcement immédiat de la protection des déposants


En période d’incertitudes, la protection des déposants sert à stabiliser l’économie en redonnant aux épargnants la confiance nécessaire vis-à-vis des établissements financiers. Il s’agit également d’un argument important du point de vue de la concurrence, car il favorise le déposant. L ‘ aggravation du problème de l ‘ aléa moral ainsi engendré perd de sa signification dans une telle situation.   De nombreux pays ont relevé leurs garanties en matière de dépôts bancaires au début du mois d’octobre 2008, afin d’apaiser les déposants Voir l’article de M. Ammann dans ce numéro. . Avec 3 0 000 francs de garantie par dépôt, la Suisse était à la traîne par rapport à d’autres places financières importantes. Les mesures d’urgence proposées par le Conseil fédéral, qui s’appliqueront jusqu’au 31 décembre 2010, prévoient d’augmenter cette limite à 10 0 000 francs. Quant à la limite supérieure du système, à savoir le montant qui garantit l’ensemble du système bancaire en cas d’insolvabilité d’une banque, elle passera de 4 à 6 milliards de francs En cas d’insolvabilité d’une banque, les autres établissements regroupés dans une association contribuent à couvrir la perte. Les dépôts garantis et la limite supérieure du système ne peuvent pas être augmentés à volonté, au risque de voir le sauvetage d’une banque en difficulté fragiliser les autres établissements. Le système actuel de protection des déposants n’est pas non plus en mesure de garantir intégralement les dépôts ouverts auprès des plus grandes banques. C’est pourquoi le Conseil fédéral entend entreprendre, d’ici au printemps 2009, une évaluation complète du système de garantie des dépôts. .   De leur côté, les banques devront désormais garantir les dépôts privilégiés. À cet effet, elles devront assurer leur couverture par des créances couvertes en Suisse ou par d’autres actifs situés dans notre pays. Les déposants auront ainsi la certitude que leurs dépôts privilégiés sont en sécurité auprès de n’importe quel établissement suisse. Une bonne partie des banques satisfont déjà à cette exigence. Un remboursement immédiat plus substantiel qu’aujourd’hui devra en outre être possible, pour les dépôts garantis, à partir des moyens liquides disponibles de la banque en difficulté. Le remboursement devra représenter un multiple des 5000 francs prévus à l’heure actuelle.

Mesures d’accompagnement


La crise a montré qu’une bonne dotation en fonds propres peut être déterminante pour atténuer de grosses pertes, et donc pour préserver la confiance à l’égard d’une banque. Les pertes provoquées par les positions de marché les plus risquées ont cependant dépassé les pires conjectures. Même le régime des fonds propres de qualité suisse de la CFB («Swiss finish»), pourtant réputé conservateur en comparaison internationale, est soudainement apparu comme insuffisant pour les grandes banques. C’est pourquoi la CFB estime que le bouclier de sécurité doit être nettement plus solide et exige que la dotation en fonds propres des grandes banques soit sensiblement renforcée à l’avenir. Pour atteindre ces objectifs, il s’agira d’abord d’augmenter cette dotation qui correspond aujourd’hui déjà à près du double des exigences minimales prévues par la réglementation internationale dite de Bâle II. En outre, la CFB introduira pour les grandes banques un ratio d’endettement («leverage ratio » ) maximal de 4% au niveau de l’établissement et de 3% au niveau du groupe. Ce taux permettra d’amortir les pertes résultant d’une évaluation erronée des risques, celles-ci ayant été insuffisamment prises en compte par le réglementation de Bâle II Les prescriptions en matière de fonds propres restent inchangées pour les autres banques. .   Des systèmes de rémunération inadéquats et mal conçus ont incité les acteurs du marché à prendre des risques exagérés et sont donc également responsables de la crise actuelle. Ainsi, la performance des employés et des cadres était mesurée exclusivement à l’aune du volume d’affaires conclues, sans tenir compte des risques à moyen et à long termes. La crise a donc suscité un débat mondial autour des modèles de rémunération. En Suisse aussi, la discussion sur le sujet est intense et a déjà permis de prendre de premières mesures (voir encadré 3Le plan d’action adopté lors du sommet qui s’est tenu le 15 novembre 2008 prévoit une série de mesures à court terme et un ensemble de réformes à moyen terme (voir www.whitehouse.gov/news). Les membres du G20 voulaient surtout colmater les brèches qui étaient apparues dans la surveillance des marchés financiers. Transparence des marchés financiers: élaboration, d’ici mars 2009, de lignes directrices concernant la valorisation des titres, en tenant compte de l’évaluation des produits complexes illiquides; à moyen terme, création d’une norme unique mondiale de tenue des comptes à partir des prescriptions actuelles. Régime de régulation: chaque pays ou région s’engage, à moyen terme, à mener une enquête approfondie, afin de s’assurer que tous les marchés et instituts financiers bénéficient d’une réglementation ou d’une surveillance. Agences de notation: elles doivent améliorer, d’ici mars 2009, la transparence à l’égard des investisseurs et des émetteurs, et traiter différemment les notations pour les produits structurés. Fonds spéculatifs: il convient également d’améliorer les règles en ce domaine. Instituts financiers: ils doivent éprouver leurs mécanismes de contrôle interne à court terme. Les banques doivent s’assurer que leur politique de rémunération ne conduit pas à des risques exagérés. Il importe également de renforcer les prescriptions qui visent les produits structurés et la titrisation. Les structures du marché des produits dérivés doivent, enfin, être améliorées, leur commerce ne passant pas par une Bourse organisée, mais se faisant de gré à gré. À court terme, les superviseurs doivent créer des collèges de surveillance pour toutes les grandes sociétés financières transnationales. La collaboration transnationale doit s’intensifier en période de crise.Le G20 a, en outre, fait des propositions pour amoindrir les conséquences économiques de la crise financière et adapter les ressources du FMI. Les économies émergentes doivent être mieux représentées dans les institutions de Bretton Woods et le FSF s’élargir à de nouveaux membres. Le groupe tiendra un nouveau sommet en avril 2009. ).

Conclusion


La crise financière a eu un impact considérable sur les acteurs des marchés financiers. Les interventions des banques centrales et des gouvernements dans le monde entier ont certes permis d’éviter jusqu’à présent un effondrement du système financier international. La crise persiste toutefois; elle laisse des traces profondes dans le monde financier et conditionne l’évolution de la conjoncture. Tous les acteurs doivent en tirer des leçons, tant au niveau national que mondial, mais les établissements financiers actifs au plan international sont bien entendu particulièrement concernés.   En résumé, pour ce qui est de la Suisse, l’adoption du train de mesures visant à renforcer le système financier a montré que les autorités savent agir de manière rapide et globale en cas de besoin. C’est essentiel pour lutter efficacement contre une telle crise. Le train de mesures visant une stabilisation à court et à moyen termes ne fausse pas la concurrence et est compatible avec les initiatives internationales. Il comprend notamment des mesures portant sur les fonds propres, la rémunération et la protection des déposants; son but est de prévenir durablement l’apparition d’autres crises.   Par rapport aux marchés financiers mondiaux, il est important de renforcer la coordination internationale des efforts en matière de stabilité financière. Il s’agit entre autres de détecter les risques suffisamment tôt et de réagir en formulant des recommandations. Le Fonds monétaire international (FMI), en vertu de son activité de surveillance (consultations au titre de l’art. IV, p. ex.), et le Forum sur la stabilité financière, en tant que moteur de la coopération informelle entre les instances nationales, les organisations internationales et les organes de régulation, devront jouer à cet égard un rôle essentiel. Les participants au sommet du G20 à Washington, le 15 novembre 2008, ont pris un certain nombre de décisions qui préludent la réforme du système financier, afin de coordonner les mesures nationales destinées à stabiliser la crise. Ils ont, en outre, discuté de la future infrastructure financière (voir encadré 3 Compte tenu de la gravité de la situation, et de la persistance de la spirale baissière des marchés malgré les multiples mesures de sauvetage, les ministres des Finances et les directeurs des banques centrales des sept pays les plus industrialisés (G7) ont décidé le 10 octobre 2008 un plan d’action concerté pour faire face à la crise. Celui-ci prévoit essentiellement une étroite coordination internationale en matière d’efforts de sauvetage. Les États du G7 entendent mettre en oeuvre tous les moyens disponibles pour soutenir d’importants établissements financiers et pour leur garantir un accès aux liquidités et au refinancement. Étant donné les tendances à la libéralisation observées durant plusieurs décennies, il est remarquable que le G7 plaide en faveur d’un approvisionnement suffisant de ces établissements en capital frais tiré des fonds publics. L’objectif consiste à rétablir la confiance, à permettre aux banques de continuer d’octroyer des crédits aux particuliers ainsi qu’aux entreprises et à renforcer la protection des déposants. Ces mesures devront être conçues de manière à protéger les contribuables et à éviter des effets dommageables pour d’autres États. Le plan d’action étant soutenu par le Comité monétaire et financier international (CMFI), c’est-à-dire par l’organe de pilotage du Fonds monétaire international qui compte 185 membres, il jouit d’une légitimité mondiale. Le 7 octobre 2008, le Conseil pour les affaires économiques et financières (Ecofin) précisait déjà dans une déclaration écrite que les gouvernements de l’UE prévoyaient notamment des interventions étatiques directes, visant à empêcher la faillite d’établissements financiers d’importance systémique. Ces interventions devront être décidées en temps utile et avoir un caractère temporaire. En tant que propriétaires de l’entreprise, les actionnaires actuels devront aussi tirer les conséquences de leurs erreurs. L’État intervenant devra de plus être à même d’influer sur la composition des organes de direction. ).   Il faut, enfin, admettre que d’autres bulles spéculatives feront leur apparition; celles-ci nécessiteront encore de sévères corrections des marchés financiers. Cependant, les acteurs ont intérêt à mettre en oeuvre tous les moyens à leur disposition pour éviter la réapparition d’une crise du système financier aussi grave que celle qui perdure depuis quinze mois.

Graphique 1 «Le train de mesures destinées à stabiliser le système financier suisse»

Encadré 1: Le plan des pays du G7 Compte tenu de la gravité de la situation, et de la persistance de la spirale baissière des marchés malgré les multiples mesures de sauvetage, les ministres des Finances et les directeurs des banques centrales des sept pays les plus industrialisés (G7) ont décidé le 10 octobre 2008 un plan d’action concerté pour faire face à la crise. Celui-ci prévoit essentiellement une étroite coordination internationale en matière d’efforts de sauvetage. Les États du G7 entendent mettre en oeuvre tous les moyens disponibles pour soutenir d’importants établissements financiers et pour leur garantir un accès aux liquidités et au refinancement. Étant donné les tendances à la libéralisation observées durant plusieurs décennies, il est remarquable que le G7 plaide en faveur d’un approvisionnement suffisant de ces établissements en capital frais tiré des fonds publics. L’objectif consiste à rétablir la confiance, à permettre aux banques de continuer d’octroyer des crédits aux particuliers ainsi qu’aux entreprises et à renforcer la protection des déposants. Ces mesures devront être conçues de manière à protéger les contribuables et à éviter des effets dommageables pour d’autres États. Le plan d’action étant soutenu par le Comité monétaire et financier international (CMFI), c’est-à-dire par l’organe de pilotage du Fonds monétaire international qui compte 185 membres, il jouit d’une légitimité mondiale. Le 7 octobre 2008, le Conseil pour les affaires économiques et financières (Ecofin) précisait déjà dans une déclaration écrite que les gouvernements de l’UE prévoyaient notamment des interventions étatiques directes, visant à empêcher la faillite d’établissements financiers d’importance systémique. Ces interventions devront être décidées en temps utile et avoir un caractère temporaire. En tant que propriétaires de l’entreprise, les actionnaires actuels devront aussi tirer les conséquences de leurs erreurs. L’État intervenant devra de plus être à même d’influer sur la composition des organes de direction.

Encadré 2: Les trois volets de la discussion sur le système de rémunération En Suisse, la discussion sur les systèmes de rémunération comporte trois volets. 1. Le 22 octobre 2008, le Conseil fédéral a décidé de renforcer, dans le projet déjà adopté relatif au droit des actions, les droits des actionnaires en matière de politique de rémunération et d’actions en restitution de prestations indûment perçues. L’assemblée générale devra notamment approuver le règlement régissant les indemnités des membres du Conseil d’administration. 2. La CFB élabore actuellement des directives générales sur les systèmes de rémunération, applicables à la branche financière. La CFB et des sociétés d’audit vérifieront si ces règles sont respectées. Lors de l’élaboration de ces directives, la CFB tiendra compte des principes qui ont été adoptés sur le plan international, afin de ne pas désavantager les établissements suisses. 3. Dans les conventions signées avec la Confédération et la BNS, l’UBS s’est engagée à observer des prescriptions sur les systèmes de rémunération qui correspondent aux pratiques d’excellence définies avec la CFB et aux standards internationaux. La BNS a élaboré des mesures concrètes et les a présentées lors de l’assemblée générale du 27 novembre 2008.

Encadré 3: Le G20 pose les premiers éléments de réforme du secteur financier Le plan d’action adopté lors du sommet qui s’est tenu le 15 novembre 2008 prévoit une série de mesures à court terme et un ensemble de réformes à moyen terme (voir www.whitehouse.gov/news). Les membres du G20 voulaient surtout colmater les brèches qui étaient apparues dans la surveillance des marchés financiers. Transparence des marchés financiers: élaboration, d’ici mars 2009, de lignes directrices concernant la valorisation des titres, en tenant compte de l’évaluation des produits complexes illiquides; à moyen terme, création d’une norme unique mondiale de tenue des comptes à partir des prescriptions actuelles. Régime de régulation: chaque pays ou région s’engage, à moyen terme, à mener une enquête approfondie, afin de s’assurer que tous les marchés et instituts financiers bénéficient d’une réglementation ou d’une surveillance. Agences de notation: elles doivent améliorer, d’ici mars 2009, la transparence à l’égard des investisseurs et des émetteurs, et traiter différemment les notations pour les produits structurés. Fonds spéculatifs: il convient également d’améliorer les règles en ce domaine.I nstituts financiers: ils doivent éprouver leurs mécanismes de contrôle interne à court terme. Les banques doivent s’assurer que leur politique de rémunération ne conduit pas à des risques exagérés. Il importe également de renforcer les prescriptions qui visent les produits structurés et la titrisation. Les structures du marché des produits dérivés doivent, enfin, être améliorées, leur commerce ne passant pas par une Bourse organisée, mais se faisant de gré à gré. À court terme, les superviseurs doivent créer des collèges de surveillance pour toutes les grandes sociétés financières transnationales. La collaboration transnationale doit s’intensifier en période de crise.Le G20 a, en outre, fait des propositions pour amoindrir les conséquences économiques de la crise financière et adapter les ressources du FMI. Les économies émergentes doivent être mieux représentées dans les institutions de Bretton Woods et le FSF s’élargir à de nouveaux membres. Le groupe tiendra un nouveau sommet en avril 2009.

Proposition de citation: Hess, Martin; Gerber, David (2008). Crise financière: la solution suisse en comparaison internationale. La Vie économique, 01. décembre.