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Entre coordination nationale et autonomie universitaire

Le développement du profil des hautes écoles et leur rayonnement international se basent sur l’équilibre adéquat entre coopération et concurrence, autonomie et coordination. Par conséquent, la planification et la répartition des tâches stratégiques nationales doivent rester flexibles et laisser une marge de manoeuvre. La coordination et la coopération ne doivent jamais devenir une fin en soi, mais servir à des améliorations ciblées dans l’interaction des hautes écoles. Il faut toujours prendre en considération à quel point la diversité de l’enseignement et de la recherche conditionne le profil des hautes écoles engagées dans la concurrence nationale et internationale. Une répartition exagérée des tâches détruirait par conséquent plus de substance scientifique qu’elle ne générerait d’efficience.

Selon la LAHE en projet, la future Conférence des recteurs assumera une responsabilité nettement plus étendue en matière de planification nationale et se concentrera sur les décisions stratégiques. Étant donné que les rectrices et les recteurs, qui en assumeront la responsabilité, seront directement impliqués, une consolidation des plans pluriannuels des hautes écoles s’avèrera superflue. Les directives et calendriers des différents organes responsables devant être respectés, toute standardisation ou synchronisation conduirait nécessairement à des procédures parallèles sans intérêt. Le législateur renonçant à définir et à énumérer les «domaines particulièrement onéreux», il laisse suffisamment de flexibilité pour réagir à temps aux changements. Même si la LAHE règle globalement ce qu’il faut planifier et coordonner au niveau national, sans préciser comment le faire, les hautes écoles et leurs organes responsables peuvent définir leur équilibre propre entre coopération et concurrence, ainsi qu’entre autonomie et coordination conformément à leur stratégie. La marge de manoeuvre laissée par le projet de loi permettant à chaque haute école d’agir de manière responsable ne peut en aucun cas être limitée par une interprétation à tendance bureaucratique du message, ce qui équivaudrait à retomber dans le système de planification lourde qui a caractérisé les décennies quatre-vingt et nonante.

Innovateur, bien qu’à contre-courant des grandes tendances européennes


Dans le débat sur le projet de loi, on ne remarque souvent pas à quel point son concept de base et ses objectifs suivent une ligne marquée par la fermeté par rapport au reste de l’Europe. Certaines règlementations de la LAHE se démarquent clairement de la tendance générale en matière de hautes écoles. Ainsi, le fédéralisme allemand – dans des conditions structurelles comparables – a systématiquement exclu l’État fédéral de presque toute participation directe et responsabilité en ce domaine au profit des Länder et ne lui laisse plus guère d’influence sauf pour les incitations financières, en particulier par le biais d’ambitieux programmes d’excellence. Les universités autrichiennes sont dotées depuis plusieurs années d’une considérable autonomie de décision et d’organisation. Toutefois, de plus en plus d’éléments constitutifs de cette législation sont à tel point la cible de réformes ministérielles et de coups de main parlementaires qu’on parle de «démantèlement de l’autonomie». Alors qu’en France et en Italie, le vieux modèle centraliste est constamment critiqué. Le système universitaire ne semble pas être à même de réellement se renouveler.

Un système académique et politique constamment mis au défi


En Suisse, les négociations entre représentants des différents organes étatiques responsables et des hautes écoles ont entre-temps abouti à un concept permettant d’unifier la mise en oeuvre de l’article constitutionnel pour les deux EPF, les universités cantonales, les hautes écoles spécialisées et même pour les hautes écoles pédagogiques. Comment la loi fédérale permettra-t-elle d’améliorer la coordination d’un paysage des hautes écoles fortement marqué par la dimension cantonale tout en encourageant fermement le développement de profils autonomes et la compétitivité de toutes les hautes écoles? Cette question restera un défi pour notre système académique et politique. La proposition du projet de LAHE de confier aux hautes écoles la responsabilité de la qualité des offres de formation selon le principe d’«autonomy and accountability» («autonomie et d’imputabilité») est un concept novateur et exemplaire sur le plan européen. Il permet aux hautes écoles suisses de s’épargner un travail considérable en limitant l’accréditation des programmes d’études aux cas dont on attend une valeur ajoutée. L’accréditation institutionnelle obligatoire constitue une garantie de confiance suffisante pour le milieu politique et une base solide pour la protection des appellations et des titres tant attendue par les hautes écoles suisses et leurs diplômés.

Proposition de citation: Antonio Loprieno (2009). Entre coordination nationale et autonomie universitaire. La Vie économique, 01 septembre.