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Le «smart money» des «business angels» investi dans les «start-ups»

Le jargon économique regorge d’emprunts à l’anglais, comme le montre ce titre qui mérite une explication. Ceux que l’on appelle les «business angels» (anges des affaires) investissent deux, voire trois fois: ils apportent du capital, de l’expérience et du temps. D’où l’expression de «smart money» ou «argent futé». Ces anges des affaires cherchent souvent, avec les proches des jeunes entrepreneurs, à financer une société en gestation. Une fois qu’elle a réuni son «seed capital» (capital de départ), la «start-up» (jeune pousse) prend son envol et peut alors devenir, grâce aux conseils avisés de ses «business angels», une entreprise florissante.

Les bailleurs de fonds institutionnels, comme les banques ou les sociétés de capital-risque et de capital-investissement («venture capital» et «private equity»), interviennent rarement durant la phase de création d’une entreprise. Depuis peu, les banques se mettent, toutefois, à collaborer avec des «business angels», afin de profiter de leur expérience. Elles conditionnent de plus en plus leurs financements à l’engagement de ces investisseurs individuels, dans la mesure où elles exigent des «matching funds» (fonds équivalents).

Le «business angel» typique


Les «business angels» typiques possèdent de l’argent, de l’expérience et des relations, qu’ils ont généralement acquis en tant qu’entrepreneurs. Ils sont prêts à fournir des capitaux, à condition de pouvoir faire profiter l’entreprise de leur savoir-faire. Cela implique donc qu’ils disposent également du temps nécessaire à un tel accompagnement. Leur but est de lancer des jeunes pousses, de les développer, de les consolider et, en fin de compte, de les rendre attrayantes aux yeux des futurs investisseurs. Le même raisonnement s’applique à des entreprises encore relativement jeunes, en phases de croissance, de restructuration ou d’assainissement. Bien souvent, le capital de démarrage n’est pas suffisant pour qu’un nouveau produit ou une nouvelle prestation réalise une percée significative sur le marché, en particulier si celui-ci a une envergure internationale. La jeune pousse peut ainsi recourir à l’expérience et au réseau de relations de ses «business angels» lorsqu’elle a besoin d’un financement complémentaire. Les anges des affaires peuvent agir à titre individuel ou en groupe, en s’associant à d’autres investisseurs partageant les mêmes vues. C’est le cas au sein de Business Angels Suisse et de ses deux sections, l’une alémanique, l’autre romande. Il existe également en Suisse une poignée d’autres associations (voir encadré 1 www.businessangels.ch, www.startangels.ch, www.biobac.angelgroups.net, www.bisangels.ch, www.cti-invest.ch, www.go-beyond.biz, www.b-to-v.com, www.venture.ch). Plusieurs manifestations ponctuelles et concours poursuivent, en outre, des buts similaires.

La jeune pousse typique


Chaque ange des affaires investit en se fondant sur ses propres critères. Certaines exigences sont, cependant, incontournables: – un besoin important doit exister sur le marché, de préférence au niveau mondial; – le produit ou le service peut être reproduit à grande échelle; – les «business angels» sont convaincus de la compétence des jeunes entrepreneurs; – il est possible, dans un laps de temps raisonnable, de développer la jeune pousse de telle sorte qu’elle attire d’autres investisseurs. L’entreprise artisanale traditionnelle ne présente pas dintérêt pour les anges des affaires. Ceux-ci recherchent plutôt, dans les branches les plus diverses, des innovations techniques et scientifiques susceptibles d’être commercialisées dans un délai plus ou moins rapproché. Les jeunes entrepreneurs apportent généralement les connaissances techniques et les «business angels» le savoir-faire commercial.

Objectif: un «exit» lucratif


Les anges des affaires s’engagent le plus souvent dans une jeune pousse pour une durée limitée. Comme indiqué plus haut, leur objectif est de construire l’entreprise, puis de s’en retirer une fois leur tâche accomplie; dans le jargon spécialisé, on appelle cela «l’exit». Ce n’est pas le travail qui manque entre l’investissement et la sortie. L’exit peut prendre différentes formes. Il se réalise de préférence, surtout dans les pays anglo-saxons, par le biais d’une introduction en Bourse («going public») ou d’une vente à une société de capital-risque. Une autre variante est la vente à un concurrent ou à un partenaire stratégique (ce que les spécialistes appellent le «trade sale»).

Comment cela se passe-t-il?


Les jeunes pousses en quête de financement prennent contact avec des «business angels» et leur soumettent un plan de développement détaillé. Un comité de sélection détermine s’il y a lieu de soumettre ce projet commercial aux autres membres du groupe d’investisseurs. Dans le cas de l’association Business Angels Suisse, les jeunes entreprises sont invitées à participer à un «dinner meeting». Lors de ces rencontres, qui se déroulent une fois par mois à Zurich et à Lausanne dans un cadre de qualité, elles expliquent comment elles entendent mettre en oeuvre leur plan de développement et répondent aux questions des participants. Si les membres de l’assemblée se montrent intéressés, des séances de suivi sont organisées. On procède alors à un examen approfondi du plan d’entreprise et on vérifie les déclarations du requérant sur la base des documents fournis (cette analyse détaillée est appelée «due diligence»). Il se peut que les questions liées à la propriété intellectuelle (brevets, secrets commerciaux) soient au centre de ces discussions. Les anges des affaires s’engagent à traiter de manière confidentielle les informations qu’ils reçoivent. Bien entendu, cet examen sert aussi à vérifier si le courant passe entre eux et les jeunes entrepreneurs. Si l’intérêt se confirme, les interlocuteurs négocient les conditions d’une participation. On porte alors une attention particulière à l’évaluation du travail fourni préalablement, en le comparant au capital que doivent apporter les «business angels». Ces négociations débouchent sur la fixation des parts dans le capital. Des dispositions annexes concernent notamment les droits de préemption et de vente commune, les clauses de non-dilution et d’autres aspects, qu’il s’agit d’inscrire dans une convention d’actionnaires. En cas d’accord, la collaboration peut commencer. La graine est semée. La jeune pousse bénéficiera de l’accompagnement nécessaire à sa croissance. Si plusieurs «business angels» d’une même association décident d’investir, ils chargent généralement l’un d’eux de s’occuper en premier de cette société. L’investisseur désigné peut accomplir sa tâche en tant que membre, ou même président, du conseil d’administration. Durant la phase de démarrage, c’est souvent cette instance qui assume véritablement la direction opérationnelle de l’entreprise.

Appel


Les anges des affaires jouent un rôle précieux dans l’économie nationale. Ils y occupent une place centrale, en particulier lorsqu’il s’agit d’innovations. Nous invitons toutes les personnalités expérimentées et capables d’investir à s’engager elles aussi dans cette voie et à devenir les «business angels» de nouvelles entreprises, lesquelles sont souvent créées par des jeunes.

Encadré 1: Associations de «business angels» en Suisse www.businessangels.ch

www.startangels.ch

www.biobac.angelgroups.net

www.bisangels.ch

www.cti-invest.ch

www.go-beyond.biz

www.b-to-v.com

www.venture.ch

Proposition de citation: Martin Wettstein (2009). Le «smart money» des «business angels» investi dans les «start-ups». La Vie économique, 01 novembre.