Rechercher

Fixer les contingents provenant des États tiers pour répondre à nos besoins tout en gardant l’immigration sous contrôle

Même dans une situation économique précaire, la Suisse a besoin de la main-d’œuvre étrangère. L’accord sur la libre circulation des personnes signé avec l’UE a renforcé le rôle de l’immigration provenant de l’UE et de l’AELE. Le Conseil fédéral, en accord avec sa politique de croissance, s’efforce d’élargir ses relations avec les États tiers. La main-d’œuvre provenant de ces pays est soumise à un contingentement annuel, dont la base repose sur les besoins des entreprises multinationales. Il convient, en outre, de ne pas perdre de vue le contexte politique et économique général.

En 2010, quelque 134 000 personnes sont venues depuis l’étranger s’ajouter à la population résidante. Parmi celles-ci, 59 000 lont fait pour des raisons de travail et 7500 relevaient d’effectifs contingentés (3900 pour les pays tiers et 3500 pour une partie de l’UE/AELE
Celle-ci se compose de l’UE8, de l’UE2 et des fournisseurs de services de l’UE27 qui travaillent depuis plus de 12 mois en Suisse.). Ces dernières, rapportées à l’ensemble de l’immigration, sont donc de faible portée. Elles jouent, toutefois, un rôle important dans la politique des migrations.En 2009, le Conseil fédéral avait tout d’abord décidé, face à la crise économique mondiale, de diviser par deux les contingents des États tiers pour l’année 2010. Les besoins s’étaient, toutefois, avérés plus élevés en raison de la reprise, plus rapide que prévue. Quatre mois plus tard, le Conseil fédéral décidait de libérer les contingents restants. La décision initiale avait effectivement fragilisé les employeurs, qui se sentaient menacés dans leurs planifications de recrutement. Depuis lors, les cantons et les représentants de l’économie exigent une hausse des contingents pour préserver la place économique. Les parlementaires ont remis en cause la politique de contingentement du Conseil fédéral
Interpellation Schneider-Schneiter, 10.3920. ou proposé de libérer les contingents pour certaines catégories de personnes
Motions Noser, 10.3525 et 10.3526.. Le 8 juin 2011, la Neue Zürcher Zeitung titrait «In der Schweizer Zuwanderungspolitik gibt es immer noch planwirtschaftliche Elemente» («La politique de la Suisse en matière d’immigration comporte des éléments d’économie planifiée»).D’une part, il est incontestable que le recrutement de main-d’œuvre complémentaire en provenance d’États tiers dans l’intérêt général de l’économie ne doit pas être entravé par un système de contingents trop rigide. Il faut privilégier les besoins à long terme. D’autre part, les critiques formulées de manière globale à l’encontre de contingents insuffisants tendent à ignorer la conjoncture politique et économique, de même que les limitations à l’immigration souhaitées par le peuple et le Parlement. Or, les contingents doivent prendre non seulement la croissance en considération, mais aussi les conditions-cadres légales et la situation du marché du travail. Afin de clarifier la question des besoins, il convient de considérer les cinq aspects suivants:1. La conjoncture et le marché du travail.2. Les expériences tirées du contingentement.3. Le système d’admission binaire.4. L’ouverture de l’économie extérieure aux États tiers.5. La qualité du besoin en main-d’œuvre provenant des États tiers.

La conjoncture et le marché du travail


Selon les prévisions conjoncturelles de cet automne, le produit intérieur brut (PIB) devrait croître faiblement l’année prochaine
Le KOF/EPFZ prévoit +1,5% alors que le groupe d’experts de la Confédération annonce +0,9% et une nouvelle hausse du chômage, la première depuis 2009.. De plus, les indicateurs de tendance reflètent un climat d’insécurité. Le risque d’une rechute dans la récession n’est donc pas exclu. L’immigration réagit généralement fortement à la situation conjoncturelle, même si c’est avec un certain retard. Nous pensons donc que, l’année prochaine, la demande en contingents restera similaire ou reculera.La mondialisation et l’innovation dans le domaine technologique entraînent des modifications à long terme de l’économie mondiale, lesquelles ont à leur tour des conséquences sur la structure du marché de l’emploi. La politique des étrangers s’y est adaptée et s’est concentrée sur les admissions de personnes hautement qualifiées et spécialisées, qui doivent compléter les effectifs en place. Au regard de cette concurrence étrangère croissante, il est décisif pour la population locale de demeurer compétitive et de suivre l’évolution technologique et les modifications de la demande de travail. L’initiative visant à combattre la pénurie de personnel qualifié, lancée cette année par le Département fédéral de l’économie (DFE), poursuit un objectif important en pariant notamment sur l’amélioration de la formation
Voir l’article de Bernhard Weber et de Sacha Kuster, p. 21ss du présent numéro.. Elle accroît ainsi la sécurité de l’emploi pour la population résidante et réduit la demande en main-d’œuvre étrangère.

Les expériences tirées du contingentement

Fixation des contingents


Les expériences faites durant une phase d’essor économique marquée par l’implantation de nombreuses entreprises en Suisse mettent en évidence l’efficacité de la politique de contingentement du Conseil fédéral. Le besoin croissant de main-d’œuvre qualifiée en provenance d’États tiers a pu être satisfait ces dernières années. Ainsi, 5300 autorisations contingentées étaient délivrées en 2003 contre 9000 en 2010. Les années où le marché du travail s’est développé modérément, les contingents n’ont été que partiellement épuisés, alors qu’en 2008 – qui a clôturé la phase de haute conjoncture – ils l’étaient à 100%.

Augmentation des contingents


Les effectifs des contingents demeurent, en règle générale, relativement constants durant plusieurs années. Réduits de 3000 unités en 2010, ils ont été totalement épuisés et il a été décidé de les augmenter en 2011. Le nombre d’autorisations de courte durée a été relevé pour la première fois en 2004 lorsque les États d’Europe de l’Est adhérant à l’UE (UE8) reçurent 2500 permis pour pays tiers, en prélude à l’élargissement de la libre circulation des personnes. C’est, du reste, l’agriculture qui en a le plus profité. Après 2006, les contingents d’autorisation de séjour de courte durée sont passés à 7000 et ont surtout bénéficié aux prestataires de services (PS) provenant des États de l’UE/AELE et aux informaticiens indiens (voir graphique 1).

Épuisement des contingents


En raison du besoin accru de maind’œuvre durant la phase d’essor allant de 2005 à 2008, l’épuisement des contingents s’est accentué (voir le graphique 2 pour les autorisations de courte durée et le graphique 3 pour les séjours). Le contingent le plus touché est celui des autorisations de courte durée, qui a été jusqu’en 2010 en grande partie utilisé pour les PS de l’UE/AELE. Depuis le 1er janvier 2011, des contingents séparés leurs sont attribués (voir encadré 1

Fixation des contingents


Chaque année, le Conseil fédéral fixe, dans le cadre des mesures de limitation prévues à l’art. 20 de la loi fédérale sur les étrangers (LEtr), le nombre des autorisations de courte durée et de séjour initiales destinés aux États tiers (pays non membres de l’UE/AELE) en vue de l’exercice d’une activité lucrative.Les prestataires de services (PS) originaires de l’UE/AELE et qui exercent une activité lucrative plus de 120 jours en Suisse ne dépendent pas de l’accord sur la libre circulation. Jusqu’en 2010, les contingents concernant les PS étaient compris dans ceux octroyés aux États tiers. Depuis 2011, ils sont séparés. Les contingents sont attribués aux cantons chaque trimestre (pas de réserve fédérale).Nombres maximums 2011: États tiers: 5000 autorisations de courte durée et 3500 autorisations de séjour; PS UE/AELE: 3000 autorisations de courte durée et 500 autorisations de séjour.Clé de répartition et réserve fédérale: la moitié des contingents relatifs aux États tiers est attribuée aux cantons en début d’année. La clé de répartition repose sur le nombre de postes à temps plein selon le recensement des entreprises effectué par l’Office fédéral de la statistique (OFS). Le nombre de personnes actives – converti en postes à temps plein – permet de prendre en compte la taille du marché de lemploi régional. Cette base ne reflétant pas totalement les évolutions à court terme (p. ex. les nouvelles implantations) et les besoins changeants des cantons, la Confédération conserve le reste des contingents. En cas de besoin, elle peut rapidement libérer des contingents supplémentaires.Réserves de l’année précédente: les contingents qui n’ont pas été épuisés à la fin de l’année peuvent être reportés dans le contingent fédéral l’année suivante. Pour l’instant, cette possibilité n’existe pas pour les PS.

). Si les contingents d’autorisation de séjour ont été épuisés en 2008 et en 2010, la situation n’était pas dramatique, l’ordonnance prévoyant la possibilité de recourir aux réserves de l’année précédente (respectivement quelque 400 et 100 autorisations). Les dernières estimations laissent présager une petite réserve d’autorisations pour 2012.

Clé de répartition


Les représentants des régions économiques les plus fortes déplorent que les contingents de ressortissants d’États tiers ne soient pas répartis entre les cantons selon les besoins réels. Les entreprises implantées dans un canton ne peuvent pas planifier leur recrutement avant que les contingents ne soient fixés
Question Schneider-Schneiter, 11.1036.. Aussi les contingents attribués au début de l’année ne suffisent-ils souvent pas à couvrir les besoins annuels effectifs des cantons. Ces derniers ont des besoins différents et des intérêts divergents. L’Office fédéral des migrations (ODM) a pour mission de concilier les deux. L’expérience montre qu’aucune clé de répartition ne peut anticiper avec fiabilité les besoins. Les entreprises ne seraient pas plus en mesure de planifier sur cinq ans leurs besoins de main-d’œuvre en provenance d’États tiers. C’est pourquoi l’ODM doit garantir que la demande à l’échelle de la Suisse soit satisfaite le plus simplement possible en attribuant régulièrement des contingents aux cantons (voir encadré 1

Fixation des contingents


Chaque année, le Conseil fédéral fixe, dans le cadre des mesures de limitation prévues à l’art. 20 de la loi fédérale sur les étrangers (LEtr), le nombre des autorisations de courte durée et de séjour initiales destinés aux États tiers (pays non membres de l’UE/AELE) en vue de l’exercice d’une activité lucrative.Les prestataires de services (PS) originaires de l’UE/AELE et qui exercent une activité lucrative plus de 120 jours en Suisse ne dépendent pas de l’accord sur la libre circulation. Jusqu’en 2010, les contingents concernant les PS étaient compris dans ceux octroyés aux États tiers. Depuis 2011, ils sont séparés. Les contingents sont attribués aux cantons chaque trimestre (pas de réserve fédérale).Nombres maximums 2011: États tiers: 5000 autorisations de courte durée et 3500 autorisations de séjour; PS UE/AELE: 3000 autorisations de courte durée et 500 autorisations de séjour.Clé de répartition et réserve fédérale: la moitié des contingents relatifs aux États tiers est attribuée aux cantons en début d’année. La clé de répartition repose sur le nombre de postes à temps plein selon le recensement des entreprises effectué par l’Office fédéral de la statistique (OFS). Le nombre de personnes actives – converti en postes à temps plein – permet de prendre en compte la taille du marché de lemploi régional. Cette base ne reflétant pas totalement les évolutions à court terme (p. ex. les nouvelles implantations) et les besoins changeants des cantons, la Confédération conserve le reste des contingents. En cas de besoin, elle peut rapidement libérer des contingents supplémentaires.Réserves de l’année précédente: les contingents qui n’ont pas été épuisés à la fin de l’année peuvent être reportés dans le contingent fédéral l’année suivante. Pour l’instant, cette possibilité n’existe pas pour les PS.

).

Le système d’admission binaire


Le système d’admission binaire, qui consiste à accorder la priorité aux ressortissants de l’UE/AELE sur ceux des États tiers, se reflète dans les chiffres sur l’immigration. En effet, force est de constater que la Suisse peut, contrairement à d’autres pays européens, combler sa pénurie de main-d’œuvre de manière bien plus efficace grâce à la libre circulation des personnes et qu’elle doit donc moins recruter dans les États tiers. Une enquête réalisée cette année par Swissmem auprès d’entreprises le confirme. Jusqu’au milieu des années nonante, la proportion dimmigrants provenant d’États tiers résidant de manière permanente et exerçant une activité lucrative en Suisse avoisinait les 40%. Aujourd’hui, elle ne dépasse pas les 12%. Le Conseil fédéral a ainsi atteint son objectif qui était, en ouvrant son marché, de déplacer le recrutement de salariés depuis les États tiers vers l’UE.La libre circulation des personnes accorde à la Suisse un rôle de précurseur au sein de l’OCDE en matière d’immigration. L’effectif des ressortissants de l’UE17/AELE résidant de manière permanente en Suisse est effectivement passé de 816 300 personnes en 2002 à 1 081 500 personnes en août 2011, soit une augmentation de 32%. Cette ouverture ne fait pas l’unanimité et met le monde politique sous pression
Initiative de l’UDC Contre l’immigration de masse; motion du groupe UDC: Réintroduction de contingents d’étrangers et priorité aux travailleurs nationaux (11.3543).. Les débats rappellent que les possibilités de pilotage direct du nombre d’immigrants par une politique de contingentement se resserrent avec l’introduction et l’élargissement de la libre circulation des personnes ainsi que le regroupement familial.

L’ouverture de l’économie extérieure aux États tiers


En vue de s’assurer une meilleure assise, la politique de croissance adoptée à long terme par la Confédération prévoit d’ouvrir davantage l’économie extérieure aux États tiers. Afin que les entreprises suisses restent compétitives par rapport à leurs concurrents étrangers, il convient donc de veiller à ce qu’elles puissent accéder de manière optimale à ces marchés. Étant donné la lenteur des négociations menées dans le cadre du cycle de Doha, la Suisse poursuit une politique de libéralisation du commerce international au moyen d’accords de libre-échange (ALE). Eu égard au système d’admission binaire, les négociations relatives au secteur Mouvement des personnes physiques revêtent une grande importance. En ce domaine, les obligations de la Suisse en vertu de l’Accord général sur le commerce des services (AGCS) se limitent, au sens de la loi fédérale sur les étrangers (LEtr), à l’admission temporaire de catégories de personnes et de prestataires de services déterminés possédant de hautes qualifications (voir encadré 2

Obligations liées au mouvement des personnes physiques


La terminologie de l’AGCS en matière de mouvement des personnes physiques se distingue de celle de la loi fédérale sur les étrangers (LEtr). En vertu des obligations fixées par ledit accord, les autorités admettent, conformément à l’art. 23, al. 3, let. d, LEtr, des catégories de personnes strictement définies. Dans la pratique, ces obligations peuvent se résumer comme suit:1. Intra-corporate transferees (ICT): cadres, cadres supérieurs et spécialistes d’une société étrangère, envoyés temporairement dans une succursale ou une filiale implantées en Suisse. Ces personnes doivent être engagées dans la société depuis au moins un an. Afin de déterminer si un employé entre dans cette catégorie de personnes, on procède à un examen de ses conditions de rémunération en se référant à sa qualification ou à sa fonction. Par contre, l’AGCS ne reconnaît pas la priorité aux travailleurs autochtones. Le séjour de ces personnes dure généralement quatre ans au maximum. Au-delà, les intéressés sont imputés au contingent.2. Contractual service suppliers (CSS): spécialistes d’entreprises étrangères non établis en Suisse, mais désireux de s’y rendre dans le cadre d’un contrat de prestations conclu avec des entreprises suisses. La durée maximale d’une prestation de service est de trois mois. L’admission est limitée aux ingénieurs et aux informaticiens qui dispensent des conseils concernant les installations informatiques et les logiciels.3. Accords de libre-échange (ALE): les obligations découlant des accords de libre-échange ont été étendues au Japon, à la Colombie et à la Corée du Sud. Elles couvrent les ICT et les CSS, ainsi qu’une nouvelle catégorie de personnes essentielle dans le domaine des exportations. L’accès au marché ne connaît pas de limitation quantitative. Ainsi, les contingents fixés conformément à la LEtr sont certes sollicités, mais ils ne peuvent restreindre l’entrée du cercle de personnes étroitement défini dans l’accord. Un refus peut seulement avoir lieu sur la base de critères qualitatifs.

).Les partenaires de la négociation exigent désormais un accès facilité pour les prestataires de services dans certaines catégories professionnelles. Pour des raisons de politique migratoire et de politique sociale, la pru-dence est de mise, en dépit des intérêts économiques de la Suisse. Selon les principes de l’AGCS, la libéralisation tend à lever les limitations quantitatives à l’immigration et les contrôles sur le marché du travail. Une admission préférentielle de certaines catégories professionnelles et de ressortissants de certains pays au titre de l’ALE pourrait saper le système d’admission binaire.

La qualité de la main d’œuvre joue un rôle important


Dans sa réponse à la question Schneider-Schneiter (11.1036), le Conseil fédéral a souligné que l’immigration de la main-d’œuvre en provenance des États tiers était gérée non seulement sur le plan quantitatif au moyen des contingents, mais aussi sur le plan qualitatif au travers des conditions d’admission. Les employeurs déterminent, d’une part, leurs besoins en main-d’œuvre. Ils sont, d’autre part, tenus de par la LEtr d’appliquer des critères qualitatifs lorsqu’ils recrutent du personnel: ordre de priorité, conditions de travail et de rémunération, qualifications personnelles. Environ 80% des ressortissants d’États tiers autorisés à travailler en Suisse sont diplômés d’une université. Les 20% restants disposent de compétences techniques particulières ou suivent des cours de perfectionnement. Il arrive également que des demandes ne répondant que partiellement ou pas du tout aux critères soient déposées. Les autorités sont alors chargées de les examiner à la lumière de la législation, de les corriger si nécessaire ou de les rejeter.Les cadres et les spécialistes en provenance des États-Unis, nouvellement engagés ou expatriés en Suisse par le groupe, occupent, depuis des années, la tête du classement des admissions contingentées. Cependant, depuis 2006, c’est l’Inde qui sollicite le plus les contingents (voir graphique 1). Cette ten-dance à la hausse provient principalement du fait que de grands groupes suisses confient des mandats d’informatique à des société d’infogérance indiennes. Les prestataires de service indiens cherchent ainsi activement à s’implanter en Europe.Une attitude trop ouverte dans un ALE comporte des risques, comme le montre le cas des États-Unis. Grâce aux échanges d’informations que nous avons avec les services américains de la migration, il apparaît que jusqu’en 2009, ce sont surtout des sociétés d’infogérance indiennes qui ont bénéficié du programme américain Visa H1B (65 000 visas temporaires pour spécialistes). Les informaticiens indiens, en pleine progression, ont même été soupçonnés d’évincer du marché du travail les spécialistes américains en informatique en acceptant des salaires inférieurs. Le Congrès américain a réagi en augmentant sensiblement les émoluments liés aux visas établis en faveur des entreprises étrangères qui sollicitent un nombre considérable de visas H1B et qui attisent la concurrence à laquelle doivent faire face les travailleurs autochtones.

Conclusion


La politique migratoire ne peut se contenter de répondre aux besoins économiques. Elle doit aussi tenir compte de l’évolution de la politique sociale. Par rapport à la libre circulation des personnes, le contingentement constitue un levier majeur de cette politique. On sait, par expérience, qu’une politique de contingentement modérée permet d’admettre, en situation d’urgence, la main-d’œuvre nécessaire de la part des États tiers.Une plus grande flexibilité serait souhaitable. Les cantons, notamment la Conférence des chefs des départements cantonaux de l’économie publique (CDEP), et l’économie ont été majoritairement d’avis cet automne qu’il faudrait envisager une augmentation générale du nombre d’autorisations de séjour de courte durée.Selon les estimations, les contingents destinés aux ressortissants d’États tiers devraient répondre aux besoins en 2011. Leur répartition pourrait néanmoins être optimisée. En effet, une augmentation des réserves au plan fédéral permettrait, par exemple, de compléter les contingents cantonaux. La Confédération aurait la possibilité de réagir plus facilement à l’évolution économique, sans pour autant négliger les considérations de politique sociale. Ce sont avant tout les autorisations de courte durée qui sont visées, dans la mesure où elles n’influencent pas réellement la démographie du pays à long terme.Le Conseil fédéral a débattu, le 23 novembre dernier, des contingents de 2012 et les a reconduit sans les modifier. Cette décision est à rapporter à l’incertitude croissante qui pèse sur le marché de l’emploi ainsi qu’aux équilibres à trouver entre les intérêts de l’économie et ceux de la société. Elle souligne que l’emploi de la population résidante et les travailleurs de l’UE/AELE continuent de bénéficier de la priorité la plus absolue. À la mi-2012, le Conseil fédéral présentera un rapport complet qui abordera dans le détail la question des contingents pour les travailleurs des États tiers.

Graphique 1: «Octroi d’autorisations contingentées par nationalité (sans PS UE/AELE), 2004–2011»

Graphique 2: «Épuisement des contingents d’autorisations de courte durée (PS UE/AELE compris), 2002/03-2011»

Graphique 3: «Épuisement des contingents d’autorisations de séjour (PS UE/AELE compris), 2002/03-2011»

Encadré 1: Fixation des contingents

Fixation des contingents


Chaque année, le Conseil fédéral fixe, dans le cadre des mesures de limitation prévues à l’art. 20 de la loi fédérale sur les étrangers (LEtr), le nombre des autorisations de courte durée et de séjour initiales destinés aux États tiers (pays non membres de l’UE/AELE) en vue de l’exercice d’une activité lucrative.Les prestataires de services (PS) originaires de l’UE/AELE et qui exercent une activité lucrative plus de 120 jours en Suisse ne dépendent pas de l’accord sur la libre circulation. Jusqu’en 2010, les contingents concernant les PS étaient compris dans ceux octroyés aux États tiers. Depuis 2011, ils sont séparés. Les contingents sont attribués aux cantons chaque trimestre (pas de réserve fédérale).Nombres maximums 2011: États tiers: 5000 autorisations de courte durée et 3500 autorisations de séjour; PS UE/AELE: 3000 autorisations de courte durée et 500 autorisations de séjour.Clé de répartition et réserve fédérale: la moitié des contingents relatifs aux États tiers est attribuée aux cantons en début d’année. La clé de répartition repose sur le nombre de postes à temps plein selon le recensement des entreprises effectué par l’Office fédéral de la statistique (OFS). Le nombre de personnes actives – converti en postes à temps plein – permet de prendre en compte la taille du marché de lemploi régional. Cette base ne reflétant pas totalement les évolutions à court terme (p. ex. les nouvelles implantations) et les besoins changeants des cantons, la Confédération conserve le reste des contingents. En cas de besoin, elle peut rapidement libérer des contingents supplémentaires.Réserves de l’année précédente: les contingents qui n’ont pas été épuisés à la fin de l’année peuvent être reportés dans le contingent fédéral l’année suivante. Pour l’instant, cette possibilité n’existe pas pour les PS.

Encadré 2: Obligations liées au mouvement des personnes physiques

Obligations liées au mouvement des personnes physiques


La terminologie de l’AGCS en matière de mouvement des personnes physiques se distingue de celle de la loi fédérale sur les étrangers (LEtr). En vertu des obligations fixées par ledit accord, les autorités admettent, conformément à l’art. 23, al. 3, let. d, LEtr, des catégories de personnes strictement définies. Dans la pratique, ces obligations peuvent se résumer comme suit:1. Intra-corporate transferees (ICT): cadres, cadres supérieurs et spécialistes d’une société étrangère, envoyés temporairement dans une succursale ou une filiale implantées en Suisse. Ces personnes doivent être engagées dans la société depuis au moins un an. Afin de déterminer si un employé entre dans cette catégorie de personnes, on procède à un examen de ses conditions de rémunération en se référant à sa qualification ou à sa fonction. Par contre, l’AGCS ne reconnaît pas la priorité aux travailleurs autochtones. Le séjour de ces personnes dure généralement quatre ans au maximum. Au-delà, les intéressés sont imputés au contingent.2. Contractual service suppliers (CSS): spécialistes d’entreprises étrangères non établis en Suisse, mais désireux de s’y rendre dans le cadre d’un contrat de prestations conclu avec des entreprises suisses. La durée maximale d’une prestation de service est de trois mois. L’admission est limitée aux ingénieurs et aux informaticiens qui dispensent des conseils concernant les installations informatiques et les logiciels.3. Accords de libre-échange (ALE): les obligations découlant des accords de libre-échange ont été étendues au Japon, à la Colombie et à la Corée du Sud. Elles couvrent les ICT et les CSS, ainsi qu’une nouvelle catégorie de personnes essentielle dans le domaine des exportations. L’accès au marché ne connaît pas de limitation quantitative. Ainsi, les contingents fixés conformément à la LEtr sont certes sollicités, mais ils ne peuvent restreindre l’entrée du cercle de personnes étroitement défini dans l’accord. Un refus peut seulement avoir lieu sur la base de critères qualitatifs.

Proposition de citation: Kurt Rohner ; Daniel Sormani ; (2011). Fixer les contingents provenant des États tiers pour répondre à nos besoins tout en gardant l’immigration sous contrôle. La Vie économique, 01 décembre.