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Vers une politique publique de l’intégration

Vers une politique publique de l’intégration

En Suisse, l’intégration des ­immigrés fonctionne plutôt bien. Elle présente, toutefois, des lacunes qu’il convient de pallier avec des mesures ciblées ayant un caractère plus contraignant, tant en matière d’encouragements que d’exigences. Le Conseil fédéral et les gouvernements cantonaux ont décidé de renforcer l’appui accordé à l’intégration et de fixer des objectifs qui s’appliqueront sur l’ensemble du territoire suisse. Cet investissement vaut la peine, car toute déficience en ce domaine engendre des coûts élevés. Les employeurs sont, eux aussi, invités à s’impliquer davantage. Le Conseil fédéral souhaite, en outre, intégrer les critères d’intégration dans la loi sur les étrangers (LEtr) et systématiser les incitations lors de regroupements familiaux et d’octroi d’un permis d’établissement.



En Suisse, étant donné le nombre des étrangers – ils constituent plus d’un cinquième de la population résidante –, on peut affirmer que l’intégration fonctionne globalement bien. Les milieux scolaires, la formation professionnelle et le monde du travail y contribuent significativement. Ce constat, qu’avait déjà fait le Conseil fédéral une première fois en 2006 grâce à une enquête de grande envergure, a été confirmé par des études récentes de l’OCDE
Mesures entreprises en vue d’assurer une meilleure intégration des étrangers, communiqué de presse du Département fédéral de justice et police (DFJP) du 30 août 2006.. L’organisation décèle, cependant, des lacunes et quelques problèmes
OCDE, L’intégration des immigrés et de leurs enfants sur le marché du travail en Suisse, 2012.. Elle suggère à la Suisse de prendre des mesures ciblées en faveur de certains groupes, notamment les jeunes bénéficiant du regroupement familial, les femmes peu ou pas qualifiées ayant des enfants en bas âge et les personnes admises en Suisse pour des raisons humanitaires. L’encouragement linguistique en âge préscolaire est important, car il améliore l’égalité des chances et les perspectives professionnelles des enfants d’immigrés. Par ailleurs, l’OCDE relève qu’en Suisse, de nombreux migrants sont surqualifiés par rapport à leur activité lucrative. Étant donné les structures fédéralistes et les divergences cantonales en matière d’intégration, elle recommande enfin à la Suisse d’œuvrer dans le sens d’une meilleure coordination à l’échelon national. L’OCDE corrobore ainsi l’orientation de la nouvelle politique suisse en matière d’intégration.

Une intégration réciproque 
et à caractère obligatoire


Depuis plusieurs années, la Confédération, les cantons et les communes ont développé des principes communs qui doivent guider la politique d’intégration aux trois niveaux étatiques: elle doit aboutir à une égalité des chances, exploiter les potentiels existants, tenir compte de la diversité et exiger une auto-responsabilité des immigrés
Unis pour une politique d’intégration forte: communiqué de presse de la Conférence tripartite sur les agglomérations (CTA), du 12 mai 2011.Pour marquer l’importance de ces principes, la politique d’intégration devra reposer, plus que par le passé, sur des préceptes ayant un caractère obligatoire pour tous, à savoir pour les immigrés eux-mêmes bien sûr, mais aussi pour les institutions d’État et les autorités cantonales, pour l’économie et les entreprises, pour les organisations et associations en Suisse ainsi que pour la population autochtone. À cet effet, le Conseil fédéral met en œuvre un plan d’intégration, en accord avec les cantons, qui en renforce le caractère contraignant et augmente sa réciprocité:

  • Il ancre d’abord les dispositions relatives à l’intégration dans le droit fédéral. À cet effet, le Conseil fédéral a adopté, le 8 mars 2013, un message concernant la révision de la loi sur les étrangers. Ce projet prévoit aussi d’adapter d’autres lois fédérales, notamment celle sur la formation professionnelle, la législation sur les assurances sociales et la loi sur l’aménagement du territoire.
  • Il conviendra ensuite de renforcer l’encouragement à l’intégration et de l’aménager de manière à ce qu’il comporte les mêmes jalons pour toute la Suisse, au niveau étatique. Le Conseil fédéral et la Conférence des gouvernements cantonaux se sont mis d’accord, fin 2011, sur les objectifs stratégiques des programmes d’intégration cantonaux (PIC) et sur un modèle de financement.
    Le Conseil fédéral ouvre la consultation sur la loi fédérale sur les étrangers et leur intégration: communiqué de presse du Conseil fédéral, du 23 novembre 2011.
  • Enfin, il conviendra d’intensifier le dialogue et la collaboration entre l’État et les acteurs non étatiques. La Confédération, les cantons et les communes s’engagent à communiquer en matière d’intégration, ceci dans le cadre de la Conférence tripartite sur les agglomérations (CTA).
    http://www.dialog-integration.ch: site Internet de la Conférence tripartite sur les agglomérations.

Encourager l’intégration 
sur le lieu de travail


Souvent, l’intégration est décrite comme une combinaison d’encouragements et d’exigences. Toutefois, si des collègues de travail, des voisins, des employeurs, des organisations des salariés, le bailleur ou des membres d’associations ne vont pas à la rencontre des immigrés dans un esprit d’ouverture et de compréhension, leur donnant ainsi une chance, les exigences et mesures d’encouragement ne sont pas d’une grande utilité. L’économie et la société civile suisses tirent profit depuis longtemps de l’afflux de main-d’œuvre étrangère. En 2012, quelque 50% des immigrés sont entrés en Suisse parce qu’on leur y avait proposé un poste. C’est dire combien il est important de les soutenir sur leur lieu de travail. Dans les années soixante et septante, des représentants de l’économie ont souvent encouragé l’intégration. Ils se sont engagés au sein d’organismes conseillant les étrangers et ont contribué à la création et au financement de centres de conseils. Entre-temps, ils ont aussi en partie oublié leurs engagements initiaux. Le principe d’encouragement à l’intégration des salariés immigrés par les entreprises a été ancré dans les législations des cantons de Bâle-Ville, Bâle-Campagne ou Appenzell Rhodes-Intérieures. Par le biais de la révision de la loi sur les étrangers, le Conseil fédéral prévoit que le principe évoqué ci-dessus s’applique aussi à l’échelon national. Cependant, lors de la mise en œuvre, il faudra tenir compte de la situation particulière de certaines entreprises. En effet, un groupe pharmaceutique dispose de possibilités et de ressources tout autres que celles d’une petite entreprise du bâtiment. La Société suisse des entrepreneurs et le syndicat Unia ont récemment prouvé que la branche du bâtiment est, elle aussi, tout à fait apte à promouvoir activement l’apprentissage d’une langue. Ils ont complété l’encouragement de l’acquisition de connaissances linguistiques – financé par le biais du fonds paritaire – en mettant sur pied le projet-pilote Deutsch auf der Baustelle («L’allemand sur le chantier»), présenté le 30 octobre 2012 dans le cadre du dialogue de l’intégration (voir encadré 1

Le dialogue de l’intégration


La Confédération, les cantons, les villes et les communes ont lancé le dialogue de l’intégration à travers leur plateforme politique, la Conférence tripartite sur les agglomérations (http://www.dialogue-integration.ch). Le dialogue a commencé en 2012 par le monde du travail. En 2013, il s’est poursuivi sur le thème «grandir» et celui consacré à la «cohabitation» débutera en l’an 2014. Le 30 octobre 2012, la Confédération, les cantons, le patronat, les syndicats, les associations de branches économiques et les représentants des populations migrantes se sont fixé des objectifs à atteindre d’ici 2016 dans les trois champs d’action suivants:

). Dans ce contexte, des représentants de haut rang de la Confédération, des cantons et des communes se sont accordés avec ceux du patronat et des syndicats
Dialogue de la CTA sur l’intégration dans le monde: objectifs de l’État et de l’économie de 2013 à 2016. Internet: http://www.tak-cta.ch, rubriques «Thèmes», « Politique des étrangers et d’intégration». sur des objectifs à caractère obligatoire. D’ici 2016, ils effectueront des appels d’offres pour des mesures d’intégration pertinentes dans les entreprises et des projets-pilotes seront ensuite lancés d’un commun accord. Grâce à ces mesures, 2000 réfugiés et personnes admises à titre provisoire supplémentaires devraient pouvoir accéder à une activité lucrative.

L’encouragement à caractère 
obligatoire, une tâche de l’État


De fait, l’intégration n’est pas seulement l’affaire de l’économie et de la société civile, mais relève aussi des tâches de l’État. C’est ce que prévoit déjà le droit sur les étrangers actuellement en vigueur
Article 53 LEtr.. Les lacunes en la matière de l’ancienne politique migratoire ont clairement démontré que les coûts engendrés par le laisser-faire de l’État concernant la politique d’intégration des étrangers sont trop élevés. Il convient donc d’obliger l’État à s’engager sur le sujet. Il doit, ainsi, mettre à disposition ses prestations et ses offres de haut niveau dans l’ensemble des cantons et les rendre accessibles à tous, donc aussi aux immigrés. Pour les offices d’orientation professionnelle et offices de placement, cela peut impliquer, par exemple, que leur personnel devra être formé de manière ciblée pour répondre aux besoins d’une clientèle très diverse, ou qu’ils engagent des personnes issues de la migration en tant que conseillers afin d’améliorer la compréhension. Pour un médecin travaillant en milieu hospitalier, cela pourrait signifier qu’en cas de difficultés de communication avec des patients étrangers, il puisse recourir à un interprète communautaire. C’est pourquoi, dans son projet de révision, le Conseil fédéral prévoit de compléter, par des dispositions ad hoc, les lois sur la formation professionnelle, le chômage, l’assurance-invalidité et l’aménagement du territoire.

De nouvelles mesures dans les ­programmes d’intégration cantonaux


Se fondant sur la convention passée entre le Conseil fédéral et la CdC, les cantons développeront cet été leurs programmes d’intégration cantonaux (PIC). Ceux-ci complèteront et intensifieront les efforts déployés actuellement au moyen de mesures ciblées. Huit domaines d’encouragement sont prévus, dont la continuité de mesures existantes, telles qu’offres de conseils, interprétariat communautaire, cours de langues, mesures en vue de l’encouragement précoce ainsi qu’un dispositif destiné à l’intégration professionnelle des réfugiés reconnus, des personnes admises à titre provisoire ou des jeunes adultes faisant partie d’un regroupement familial. De cette manière, les cantons prennent des mesures ciblées en vue de pallier les déficits en matière d’intégration mentionnés par l’OCDE.Il est également prévu de fournir une première information lors de l’accueil des immigrants de longue durée dans notre pays et de les renseigner de manière appropriée. Au besoin, lorsqu’un encouragement particulier se fera sentir, il conviendra de prendre aussi vite que possible les mesures appropriées. Toute discrimination empêche les étrangers de participer de manière responsable à la vie économique et sociétale. C’est pourquoi les autorités cantonales ont prévu que cette question constituerait un nouveau domaine de leurs programmes d’intégration. À l’avenir, toutes les personnes ayant besoin de conseils les obtiendront. Il est aussi prévu de créer des offres pour les entreprises, les autorités et des institutions.

La Confédération et les cantons 
augmentent l’enveloppe financière


La Confédération finance partiellement les programmes d’intégration cantonaux et sa contribution passera de 16 à 36 millions de francs. Cette augmentation des ressources est, cependant, liée à la condition sine qua non que les cantons, eux aussi, adaptent les ressources allouées et participent au moins pour moitié au financement de ces programmes. Le forfait d’intégration en faveur des réfugiés reconnus et des personnes admises à titre provisoire constitue la seule exception à cette nouvelle règle; à l’avenir, il devra également financer les programmes d’intégration cantonaux. La Confédération et les cantons contribueront ainsi chaque année, à raison de quelque 110 millions de francs, à encourager l’intégration. L’Office fédéral des migrations (ODM) conclut des conventions de programmes avec les gouvernements cantonaux; une première phase ira de 2014 à 2017.

Une meilleure coordination et des mesures cohérentes


Les PIC illustrent un changement de paradigme, à savoir le passage d’un encouragement de l’intégration axé sur des projets à une politique d’intégration dont les pouvoirs publics cantonaux conçoivent les programmes. Une vaste analyse des besoins et des stratégies ne peut qu’améliorer l’articulation des mesures envisagées. Bénéficiant ainsi d’une meilleure coordination et d’une cohérence renforcée, celles-ci peuvent s’appliquer à des besoins spécifiques. Par exemple, lorsqu’une écolière du niveau secondaire arrive en Suisse par le biais du regroupement familial d’un ressortissant turc, elle pourra, grâce à la primo-information de la commune, être adressée directement à une structure d’orientation professionnelle. Le résultat sera plus concluant si le conseiller a été formé aux questions interculturelles et bénéficie d’un réseau: il pourra ainsi indiquer à la jeune Turque – de manière compréhensible et motivante – quelles sont les possibilités qui s’ouvrent à elle sur le plan professionnel. L’intéressée sera pleinement intégrée professionnellement si elle peut effectuer un apprentissage débouchant sur un CFC ou sur une attestation fédérale et si l’on peut impliquer et informer ses parents ainsi que les inciter à soutenir leur fille de manière ciblée. Cette coopération améliorée entre les institutions et les bénéficiaires des programmes d’intégration cantonaux – qui déploieront leurs effets stratégiques dans les années à venir – est la clé d’une intégration réussie.

Les critères à caractère obligatoire


En fin de compte, l’intégration des immigrés dépend de leur implication dans le processus. Ils doivent prendre leurs responsabilités, comme le font la plupart des étrangers vivant dans notre pays. Ce principe d’auto-responsabilité implique que tous les immigrés doivent s’efforcer:

  • de respecter la Constitution fédérale;
  • d’observer l’ordre juridique du lieu où ils résident;
  • dans la mesure de leurs possibilités et de leurs capacités, de subvenir aux besoins de leur famille, de se former et de se perfectionner professionnellement;
  • d’apprendre le plus vite possible la langue parlée localement afin de pouvoir se faire comprendre, nouer des contacts ou se défendre.


Le projet de loi du Conseil fédéral mentionne de manière exhaustive ces quatre critères d’intégration, à caractère obligatoire. Les autorités compétentes doivent les évaluer avant d’octroyer une autorisation de séjour. Le législateur n’imposera, cependant, pas d’autres critères que ceux-là, car on ne saurait exiger des migrants qu’ils abandonnent leur culture ou leur mode de vie.

Inciter systématiquement


Le projet de loi du Conseil fédéral comporte de nouvelles incitations, sous la forme de conditions relevant du droit des étrangers, afin que soient remplis les critères en matière d’intégration. L’une d’entre elles est liée au regroupement familial qui, en dehors de la recherche d’une activité lucrative, constitue le plus important motif d’immigration (30% en 2012). Si, par exemple, une jeune femme ou un jeune homme rejoint son conjoint 
étasunien, turc ou tamoul en Suisse, ils doivent démontrer leur volonté d’apprendre la langue parlée là où ils habitent. À l’avenir, ces personnes devront le faire en s’inscrivant à une offre d’encouragement linguistique; le projet de loi prévoit en effet une condition d’admission dans ce sens pour les personnes bénéficiant d’un regroupement familial accordé à des ressortissants d’États tiers.Le projet de révision de la LEtr prévoit une autre incitation en vue de l’autorisation d’établissement: selon les nouvelles règles, il existe un droit d’obtenir une autorisation d’établissement, à condition toutefois que ceux qui en font la demande soient bien intégrés. Les autorités compétentes devront désormais systématiquement apprécier cette condition à la lumière des quatre critères susmentionnés. Le Conseil fédéral a renoncé à introduire la vérification des autorisations de séjour renouvelées chaque année, telle qu’elle avait été suggérée en procédure de consultation. De l’avis du Conseil fédéral, cette vérification constituerait une charge bureaucratique disproportionnée au regard des quelque 200 000 permis octroyés ou renouvelés chaque année.

Des conventions d’intégration ciblées


Grâce à ce nouvel instrument qu’est la conclusion de conventions d’intégration, prévue par la révision de la loi, les autorités cantonales compétentes auront la possibilité de lier le droit de séjour des étrangers à des conditions, . Le projet de loi prévoit de faciliter et de simplifier l’échange d’informations entre les autorités. Ainsi, celles qui sont compétentes en matière de migration doivent être informées lorsqu’un responsable de la protection de l’enfance ou des adultes ordonne une assistance ou lorsque des violences domestiques sont dénoncées. Dans de tels cas, ces autorités pourront prendre les mesures qui s’imposent en concluant des conventions d’intégration. Le nouveau projet de loi permet également de révoquer des autorisations de séjour lorsque la personne concernée ne la respecte pas, sans que des motifs valables soient évoqués.

La politique d’intégration 
est aussi ­sociétale


L’intégration des immigrants est encore considérée chez certains comme une branche annexe de la politique sociale et de la lutte contre la pauvreté. À tort: une politique moderne en matière d’intégration va bien au-delà et s’entend plutôt comme une impulsion de la politique sociétale: il s’agit, en effet, de faire profiter durablement la société et l’économie de la diversité culturelle et des potentiels existants. Des études effectuées dans les pays limitrophes de la Suisse montrent qu’une intégration bien pensée peut également être intéressante sur le plan fiscal
Bertelsmann Stiftung, Gesellschaftliche Kosten unzureichender Integration von Zuwanderinnen und Zuwanderern in Deutschland, 2009.. La politique que le Conseil fédéral et les gouvernements cantonaux cherchent de concert à développer ne constitue dès lors pas seulement un complément aux orientations migratoires de notre pays, mais également un investissement en vue de sa prospérité et de sa cohésion sociétale.

Encadré 1: Le dialogue de l’intégration

Le dialogue de l’intégration


La Confédération, les cantons, les villes et les communes ont lancé le dialogue de l’intégration à travers leur plateforme politique, la Conférence tripartite sur les agglomérations (http://www.dialogue-integration.ch). Le dialogue a commencé en 2012 par le monde du travail. En 2013, il s’est poursuivi sur le thème «grandir» et celui consacré à la «cohabitation» débutera en l’an 2014. Le 30 octobre 2012, la Confédération, les cantons, le patronat, les syndicats, les associations de branches économiques et les représentants des populations migrantes se sont fixé des objectifs à atteindre d’ici 2016 dans les trois champs d’action suivants:

Encadré 2: Le concept d’encouragement ­linguistique Fide

Le concept d’encouragement ­linguistique Fide


L’authentification des connaissances linguistiques ne doit toutefois pas constituer un obstacle pour les personnes peu instruites. C’est ce que garantit le concept d’encouragement linguistique «Fide» – Français, Italiano, Deutsch –, développé par l’Institut de plurilinguisme à Fribourg. Dans les régions francophones, son titre officiel est «Fide | Français en Suisse – apprendre, enseigner, évaluer» . Ce concept ne dispense pas des connaissances linguistiques abstraites: les participants y apprennent à se faire comprendre dans des situations concrètes, par exemple chez le médecin, au sein de leur entreprise ou dans les administrations. Avec «Fide», on dispose désormais d’un instrument qui permet d’authentifier, en cours d’enseignement, les compétences linguistiques nécessaires à la vie quotidienne des immigrés. L’année prochaine, il est aussi question de développer et d’introduire un processus d’authentification indépendant de l’enseignement. L’objectif est de disposer d’un passeport linguistique valable dans toute la Suisse, qui répondra aux besoins de la pratique et sera reconnu par les institutions de formation, les autorités et le secteur économique. Internet: http://www.fide-info.ch

Encadré 3: Valoriser les aptitudes professionnelles des immigrants

Valoriser les aptitudes professionnelles des immigrants


Récemment, l’Office fédéral de la statistique a publié un certain nombre de nouveaux indicateurs d’intégration. Ils révèlent que les immigrants sont deux fois plus nombreux à exercer une activité lucrative pour laquelle ils sont surqualifiés (16,6 % en 2012) que les travailleurs sans passé migratoire (9,6 %). Relevons que les personnes provenant d’États tiers – extérieurs aux frontières de l’UE/AELE – sont même quatre fois plus nombreuses à être surqualifiées pour le poste qu’elles occupent (41.8 %).a

Une meilleure exploitation de ces potentiels leur permettrait non seulement de mieux réussir leur intégration professionnelle, mais constituerait aussi un grand avantage pour le marché de l’emploi helvétique, qui, indirectement, serait moins contraint de recruter à l’étranger. Ceci irait, par ailleurs, dans le sens de l’initiative du Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche (DEFR) visant à combattre la pénurie de personnel qualifié.b

C’est en ce sens que l’ODM a lancé le projet pluriannuel Exploiter les potentiels. Les réfugiés reconnus et les personnes admises à titre provisoire doivent être encouragés de telle manière qu’ils puissent trouver un emploi correspondant aux diplômes et aux compétences professionnelles acquis dans leur pays d’origine.

a Différences dans la vie active et les compétences ­linguistiques, Office fédéral de la statistique (14 mai 2013).
b Initiative visant à combattre la pénurie de personnel qualifié: la Confédération, les cantons et les partenaires sociaux coordonnent et renforcent leurs efforts, communiqué de presse du Secrétariat d’État à l’économie (Seco) du 21 mai 2013.

Proposition de citation: Adrian Gerber (2013). Vers une politique publique de l’intégration. La Vie économique, 01 juillet.