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Retour à l’expéditeur

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Le conseiller fédéral Alain Berset prétend que les propositions présentées à la mi-juin dernier en matière de prévoyance vieillesse sont équilibrées. Comment par- vient-il à une telle conclusion? En analysant le projet de plus près, l’on constate qu’il repose plei- nement sur les excédents de recettes. Les économies n’apparaissent qu’à doses homéopathiques, alors que les impôts et les contributions salariales seront très largement sollicités.

Concrètement, les économies devraient être de 1,5 milliard de francs. Près de la moitié de cette somme serait aussitôt absorbée par l’amélioration des prestations. Les dépenses évitées seraient donc nettement inférieures à 1 milliard. Les nouvelles recettes, provenant de la hausse de la TVA et des contributions salariales, devraient, par contre, rapporter 8,5 milliards. Pire encore, si les ressources de l’AVS descendent en dessous d’un certain seuil, il sera possible d’activer un processus permettant de prélever un pourcentage supplémentaire sur les cotisations salariales, ce qui nous coûterait plus de 3 milliards supplémentaires.Pour assurer la prévoyance vieillesse, il faudrait donc 11,5 milliards par an de plus qu’actuellement. Cette charge retomberait sur la population active, les contribuables, les consommateurs et les entreprises, ce qui causerait d’énormes dégâts à l’économie. Le pouvoir d’achat des ménages diminuerait considérablement, de même que la consommation. Les entreprises seraient privées de ressources, alors que leurs investissements ne peuvent attendre. La solidarité entre générations serait très mal au point. Pour l’économie, les propositions émises par le département d’Alain Berset sont une pure provocation, qu’il convient de refuser catégoriquement. Le Conseil fédéral ferait bien de revoir son projet de fond en comble, car la version actuelle échouera lamentablement dans les urnes, si ce n’est avant.

On ne pourra éviter de relever progressivement l’âge de la retraite…


Pour l’économie, la consolidation financière de la prévoyance vieillesse n’est pas incompatible avec le relèvement progressif de l’âge de la retraite. L’idéal serait deAVS en créant un mécanisme similaire au frein à l’endettement. Les réserves de capital de l’assurance étatique disposeraient d’une marge de fluctuation. Le Conseil fédéral devrait vérifier tous les ans si le fonds de réserve de l’AVS peut continuer d’évoluer dans cette zone. En cas de dépassement possible de la limite inférieure, l’âge de la retraite devra être relevé tous les mois. Il est possible qu’il reste stable pendant longtemps ou même qu’il diminue. La fixation de l’âge de la retraite devrait se faire deux ans avant son application, ce qui, en raison de la forte fiabilité des besoins financiers à moyen terme de l’AVS, ne devrait pas poser de problème. Les assurés et les entreprises disposeront ainsi d’un délai suffisant pour s’adapter. Afin que les deux sexes soient à égalité devant l’âge de la retraite, il faudra rapprocher celui des femmes d’au moins un mois de celui des hommes à chaque adaptation durant cette période, jusqu’à ce que l’écart actuel soit éliminé.En Suisse, les salariés peuvent prolonger leur activité; le travail ne manque heureusement pas. On le voit aussi bien à la forte immigration de ces dernières années qu’au manque de main-d’œuvre qualifiée dont souffrent quasiment toutes les branches. La situation est telle que 35% des actifs travaillent déjà au-delà de l’âge ordinaire de la retraite. Le taux de chômage des plus de 60 ans est, en outre, nettement inférieur à la moyenne suisse.

… ce qui aide à maintenir la prospérité


Un report de l’âge de la retraite peut, en soi-même, ne pas être très populaire. C’est, pourtant, un moindre mal par rapport à une diminution des rentes ou à une augmentation massive des impôts et des contributions. Il permet surtout à notre prospérité de se maintenir. De nombreux pays européens en crise montrent l’exemple à ne pas suivre. Ils illustrent clairement que des charges salariales excessives, associées à une offre en matière de protection sociale, étouffent l’économie et favorisent le chômage, la misère sociale ainsi que la pauvreté. La Suisse doit donc s’en préserver.

Proposition de citation: Kurt Gfeller (2013). Retour à l’expéditeur. La Vie économique, 01 septembre.