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Un plaidoyer pour la route

Nos routes ne permettent pas seulement de franchir des distances. Elles relient également des gens et des entreprises, facilitant ainsi les processus économiques et de création de valeur qui assurent la prospérité de notre pays. Pour pratiquement toutes nos activités quotidiennes, tant professionnelles que privées, nous sommes habitués à utiliser le réseau routier. Il est d’autant plus étonnant que, dans les discussions politiques, on évoque presque exclusivement les coûts de la route, en passant ses prestations et ses avantages.

Selon des calculs réalistes, les quelque 230 000 employés de l’industrie automobile suisse et des entreprises qui lui sont liées ont produit en 2011 un chiffre d’affaires d’environ 95 milliards de francs. À elle seule, la vente de véhicules neufs importés par les membres de notre association – 319 000 voitures de tourisme et 36 300 véhicules utilitaires – a généré 16,1 milliards de francs. Le chiffre d’affaires des garages et des carrosseries s’est élevé à 19,0 milliards. Celui des transports a atteint 18,7 milliards, tandis que les sociétés d’essence et les stations-service ont généré 11,5 milliards. Les compagnies d’assurance participent également au bilan total, à hauteur de 4,6 milliards. Une série d’autres entreprises ou institutions, telles que les clubs d’automobilistes, les sociétés de «leasing», les auto-écoles et les parkings couverts ont permis de dégager 11,2 milliards de francs supplémentaires. L’apport des sous-traitants suisses de l’industrie automobile internationale a, enfin, été considérable, puisqu’il s’est élevé à 14,0 milliards.

Ce total de 95 milliards de francs a permis à la Confédération et aux cantons d’encaisser des redevances pour plus de 11 milliards. Celles-ci proviennent principalement de l’imposition des carburants, de l’impôt sur les véhicules à moteur, de la taxe sur les importations de voitures, de la TVA, des recettes issues de la vignette autoroutière et de la redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations (RPLP). Tous ces chiffres montrent clairement que l’industrie automobile est un facteur économique très important en Suisse et qu’elle est d’un apport précieux à l’économie nationale.

Les prestations substantielles du transport routier


Le besoin de loisirs de qualité, la croissance économique, la concentration de la production et des emplois sur un nombre réduit de sites, ainsi que la mondialisation entraînent une augmentation du transport de personnes et de marchandises, ce qui concerne aussi la route. Prenons l’exemple des marchandises en Suisse: les prestations de transport dans ce domaine ont progressé globalement de 90% entre 1980 et 2011. Le transport de marchandises par la route a connu un essor beaucoup plus important (+155%) que celui par le rail (+31%). Par conséquent, la répartition modale a évolué nettement au profit de la route: la part du rail dans le transport de marchandises a chuté durant cette période, passant de 53% en 1980 à 37% en 2011.

Selon un rapport publié en août dernier par l’Office fédéral de la statistique (OFS), les réseaux routier et ferroviaire suisses ont cumulé 121,8 milliards de personnes-kilomètres en 2011. Les trois quarts – soit près de 90 milliards de personnes-kilomètres – relèvent du trafic routier motorisé privé (voitures, motocycles, cars privés). La prestation de la route est ainsi quatre fois et demie plus élevée que celle du rail (19,6 milliards). La mobilité douce (à pied et à vélo) a permis de parcourir 7,7 milliards de personnes-kilomètres, tandis que les transports publics (trams et bus) en ont totalisé 4 milliards. Depuis 1970, les prestations du trafic individuel motorisé et des transports publics ont presque doublé. En 2012, le trafic motorisé privé a atteint 55 milliards de véhicules-kilomètres (+27% depuis 1995). Les chemins de fer ont, de leur côté, alignés 188 millions de trains-kilomètres (+42% depuis 1995).

La vache à lait de la nation?


Étant donné cette performance du trafic routier, il est tout à fait légitime qu’un comité interpartis ait lancé l’initiative dite «Vache à lait». Ce texte vise à lutter contre le pillage par l’État du porte-monnaie des usagers de la route et à faire appliquer de manière rigoureuse le principe de causalité: les taxes, redevances et impôts payés par les usagers doivent désormais entièrement revenir aux infrastructures routières. À cet effet, il faut modifier l’article 86 de la Constitution fédérale, qui règle les impôts de consommation grevant les carburants et la redevance pour l’utilisation des routes nationales. L’initiative demande que la totalité du produit net de l’impôt à la consommation sur les carburants soit affectée au financement de tâches et de dépenses en rapport avec le trafic routier, et non plus uniquement la moitié de l’impôt de base sur les huiles minérales comme c’est le cas jusqu’à présent. Tout le monde, en effet, a besoin d’un réseau routier performant et en bon état, les usagers des transports publics comme les automobilistes.

Proposition de citation: Andreas Burgener (2013). Un plaidoyer pour la route. La Vie économique, 01 décembre.