Tous les pays – industrialisés, émergents ou en développement – entretiennent des organisations chargées de promouvoir les exportations. Des acteurs tels que Switzerland Global Enterprise (S-GE) ou Business France aident les entreprises exportatrices à conquérir des marchés extérieurs et à y consolider leur position. Dans de nombreux pays, ils accordent aux petites et moyennes entreprises (PME) une attention particulière. Celles-ci commencent, depuis quelques années, à internationaliser leurs activités commerciales. Nombre d’entre elles souffrent toutefois de problèmes structurels. Leurs ressources humaines et financières étant limitées, elles n’ont souvent pas les capacités, le savoir et l’expérience nécessaires pour progresser dans ce processus d’internationalisation.
La promotion du commerce extérieur est un domaine toujours plus étendu. Par le passé, les organisations concernées se limitaient à soutenir les entreprises dans leurs exportations. Aujourd’hui, cette aide s’étend à d’autres domaines, comme les investissements directs[1]. Selon le système politique et la tradition économique du pays, la conception et l’orientation de la politique de promotion peuvent varier sensiblement.
Les Britanniques en tête
Une étude a comparé les ressources dont disposaient en 2014 les promoteurs du commerce extérieur de six pays industrialisés : Allemagne, France, Royaume-Uni, Japon, Autriche et Suisse. Elle a mis en évidence des écarts considérables au niveau de leur dotation financière (voir tableau). L’organisation britannique UK Trade & Investment (UKTI) arrive en tête avec un budget de 260 millions d’euros. Les Chambres allemandes du commerce à l’étranger (Auslandshandelskammern, AHK) et Business France occupent le milieu du classement, avec respectivement 180 et 140 millions d’euros. Les budgets des organismes autrichien et suisse sont nettement plus modestes : celui d’Aussenwirtschaft Austria atteint 89 millions par an et celui de Switzerland Global Enterprise équivaut à 29 millions d’euros. Le budget de la Japan External Trade Organization (Jetro) n’est pas public, mais il devrait se situer dans la tranche supérieure, à en croire la partie visible de la dotation en ressources.
Si l’on rapporte les budgets aux PIB, le tableau diffère quelque peu. C’est cette fois l’Autriche – et de loin – qui fournit les moyens les plus importants à la promotion de ses exportations. Le Royaume-Uni arrive en deuxième position. L’Allemagne, la France et la Suisse suivent.
Il existe également de notables différences en ce qui concerne la part du financement public dans le budget global. Ainsi, UKTI et Jetro sont financées dans une large mesure par l’État. Seule une petite portion de leur budget provient de leurs prestations. Chez Business France et S-GE, la part des fonds de tiers est un peu plus élevée et représente un bon quart du budget. Ces deux organisations n’en demeurent pas moins financées en grande partie par l’État.
La part étatique est nettement plus faible dans le cas d’Aussenwirtschaft Austria et du réseau allemand d’AHK. Le budget de la première est alimenté en principe par les contributions découlant de l’affiliation obligatoire de toutes les entreprises à la Chambre de commerce autrichienne. Des fonds étatiques limités dans le temps sont également mis à disposition via l’initiative « Go international » qui aide les firmes à accéder aux « marchés du futur ». En tenant compte de ces ressources, la part de financement public d’Aussenwirtschaft Austria s’élève aujourd’hui à 16 %. En Allemagne, la subvention générale de l’État fédéral représente un cinquième du budget total.
Le nombre de collaborateurs et la présence internationale diffèrent aussi sensiblement. Avec 176 sites dans 110 pays, c’est la britannique UKTI qui dispose du réseau le plus dense et le plus étendu de représentations à l’étranger. Le réseau allemand d’AHK comprend certes moins de sites, mais il compte davantage de collaborateurs à l’étranger que UKTI. La suisse S-GE se situe au bas de l’échelle avec des « business hubs » dans 21 pays. À titre de comparaison, Aussenwirtschaft Austria est présente dans septante États. Avec ses 180 employés, S-GE est aussi de loin l’organisation qui emploie le moins de personnes et dont le nombre moyen de collaborateurs par représentation à l’étranger est le plus bas.
La promotion des exportations dans six pays
Business France | Chambres allemandes du commerce à l’étranger | UKTI (Royaume-Uni) | Aussenwirtschaft Austria (Autriche) | Switzerland Global Enterprise (Suisse) | Japan External Trade Organisation (Japon) | |
Forme juridique | EPIC (établissement de droit public) | Associations de droit privé | Unité administrative | Département d’un organisme de droit public (Chambre de commerce autrichienne) | Association de droit public | Entreprise publique avec des tâches spéciales |
Propriétaire | État | Privé | État | Privé | Privé et État | Privé et État |
Budget, en millions d’euros | 140 | 180 | 260 | 89 | 29 | n.c. |
Budget par rapport au PIB, en ‰ (arrondi) | 0,07 | 0,06 | 0,11 | 0,27 | 0,05 | n.c. |
Part de financement public dans le budget, en % | 72 | 20 | 93 | 16a | 72 | 89 |
Nombre de collaborateurs (en ETP) dans le pays et à l‘étranger | 1500 | 1930 | 1900 | 800 | 180 | 1540 |
Nombre de pays | 70 | 90 | 110 | 70 | 21 | 54 |
a. Contributions de l’État dans le cadre de l’initiative « go-international », limitée dans le temps.
Hauser et al. (2016) / La Vie économique
La participation étatique renforce les contrôles d’efficacité
Afin de vérifier les prestations et de connaître l’impact de leurs offres, les organisations chargées de la promotion du commerce extérieur supervisent les résultats de leurs activités au moyen de différents instruments et systèmes. La question est de savoir avec quelle intensité elles le font. Un indice a été établi pour calculer l’intensité des contrôles d’efficacité. Il se base sur trois critères. Le premier se réfère aux indicateurs clés de performance. Il mesure le nombre et l’adéquation des indicateurs et des objectifs utilisés. Le deuxième évalue la méthodologie appliquée sous l’angle de la validité et de l’objectivité. Le troisième concerne la notification (ampleur/précision, fréquence).
On constate d’abord que toutes les organisations analysées ne mesurent pas leurs prestations et leur impact avec la même intensité et la même rigueur. En outre, il existe un rapport positif entre l’intensité du contrôle d’efficacité et le financement de la promotion des exportations par l’État : plus la part du financement public est élevée, plus le contrôle d’efficacité est intensif (voir illustration). Sur la base de cette évidence empirique, on peut supposer qu’une participation financière élargie de l’État s’accompagne d’un renforcement du contrôle d’efficacité. Cela signifie que le mandataire étatique exerce une influence considérable sur ce contrôle dans la promotion des exportations.
Relation entre contrôle d’efficacité et financement public
Source: Derungs, Hauser, Wellinger / La Vie économique
La collecte de données prend de l’importance
Les cas étudiés permettent plusieurs conclusions. La majorité des organisations de promotion analysées ne s’appuient pas seulement sur un contrôle purement financier ; elles utilisent une approche complète et systématique pour mesurer leurs prestations et leur impact. Elles se tournent implicitement vers la chaîne des résultats obtenus grâce aux ressources investies : cela englobe les prestations fournies, l’impact sur les clients et les effets économiques induits. En mesurant de manière répétée les prestations fournies et leurs effets, on détermine comment la performance et l’efficacité se modifie dans le temps.
Il est frappant de constater que les organisations de promotion s’efforcent de collecter, à l’échelle de l’entreprise individuelle, des données financières toujours plus nombreuses sur leurs clients. Elles veulent savoir, par exemple, comment l’acquisition de services se répercute sur le bénéfice et la productivité des sociétés qu’elles accompagnent. On observe une tendance à mener des enquêtes de suivi : les clients sont systématiquement interrogés, quelques mois après l’acquisition de services, sur leur impact perçu au sein de l’entreprise. Ces entretiens sont aussi utilisés pour fidéliser la clientèle et pour définir des mesures destinées à garantir la qualité.
L’appréciation des effets économiques (par exemple le nombre d’emplois soutenus, le niveau des exportations induites par la promotion) continuer de poser des problèmes méthodologiques majeurs. Certes, de nouvelles méthodes statistiques permettent de mesurer ces effets, mais elles sont complexes et l’on n’y recourt généralement que dans le cadre d’évaluations complètes de programmes.
L’infrastructure informatique est essentielle
Un contrôle d’efficacité systématique exige d’importantes ressources financières et humaines, qui peuvent aller, selon des estimations, jusqu’à 5 % du budget annuel. Ces dernières années, la mesure des prestations et de l’efficacité est devenue beaucoup plus professionnelle et l’on a investi des sommes considérables dans l’infrastructure informatique. La gestion des relations avec les clients (GRC) permet, en particulier, d’établir l’historique de chacun d’eux et de répertorier les rapports entretenus avec eux. Sur cette base, il est possible de mesurer les indicateurs de performance et d’effectuer des analyses pertinentes.
Les organisations font souvent appel à des instituts de sondage externes tant pour collecter des données que pour les analyser. Quelques-unes confient à des hautes écoles ou à des instituts de recherche le mandat d’étudier scientifiquement des questions précises (en particulier les interactions) dans le cadre d’analyses spéciales.
Certaines organisations de promotion, dont UKTI, publient les résultats détaillés de leurs contrôles d’efficacité. Elles utilisent ces rapports de manière ciblée pour leur communication politique. Ils sont donc destinés aux décideurs, à l’administration financière, à la commission parlementaire des finances ou au Parlement. Il faut relever que la conception et la définition des indicateurs et des indices s’effectuent en étroite concertation avec le mandataire politique. Le contrôle d’efficacité concomitant ne remplace toutefois pas l’évaluation périodique de la subvention étatique par un organisme indépendant.
Les contrôles systématiques se généralisent
Au niveau international, on constate qu’un contrôle systématique de l’efficacité de la promotion des exportations est en train de devenir la norme (bonne pratique). La progression du professionnalisme dans ce domaine se traduit par une supervision effectuée à l’interne, combinée avec des évaluations externes. L’étude a montré qu’un système moderne et intégral de GRC constitue une base importante pour un contrôle systématique de l’efficacité.
Introduire de nouveaux systèmes ou développer ceux qui existent implique de prendre en compte le fait que l’exécution de contrôles d’efficacité systématiques exige des ressources considérables. La dépense semble toutefois se justifier, au regard du bénéfice que suscite une mise en œuvre cohérente. De même, il est avantageux d’associer le mandataire étatique au développement d’instruments de contrôle. Cela accroît l’acceptation et la compréhension mutuelle de tels mécanismes dans la promotion des exportations.
En ce qui concerne la Suisse, on constate que sa promotion des exportations dispose de ressources humaines et financières relativement minces. S-GE se situe dans le haut du classement en ce qui concerne la part que le financement public occupe dans le budget total. Il en est de même pour le financement public par collaborateur. Ses contrôles d’efficacité sont, par ailleurs, d’un niveau relativement élevé. C’est là un élément positif.
- Plusieurs organisations sont également chargées de promouvoir la place économique et d’attirer des investisseurs étrangers. La présente analyse ne traite pas de cet aspect. []