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La surévaluation du franc met l’hôtellerie sous pression. Les établissements de montagne sont les plus vulnérables, sans qu’on puisse déceler une accélération des mutations structurelles.
Christophe Hans, Responsable Politique économique, Hotelleriesuisse, Berne

Prise de position

La levée par la Banque nationale suisse (BNS) du taux plancher du franc face à l’euro a résonné pour l’hôtellerie comme un coup de tonnerre dans un ciel déjà lourd. Les hôtes européens ont immédiatement réagi à la nouvelle situation : le nombre de leurs nuitées a diminué de 9,3 % l’an dernier, tombant au même niveau qu’en 1958 !

Près de 70 % des établissements ont pu présenter des résultats satisfaisants ou, du moins, se maintenir à flot. Inversement, les 30 % restants doivent lutter pour leur survie. Ils ne parviennent plus à dégager suffisamment de liquidités pour effectuer les rénovations et les investissements indispensables à leur compétitivité.

Cette tendance ne date, cependant, pas de la suppression du taux plancher vis-à-vis de l’euro, mais bien de 2008, avec le renchérissement progressif du franc. La décision prise en janvier 2015 par la BNS a eu pour effet de renforcer l’impact psychologique sur les hôtes européens et suisses. La Suisse a renchéri et les pays limitrophes sont devenus meilleur marché.

Moins d’établissements, mais plus grands


Depuis 2009, l’hôtellerie-restauration a constamment amélioré sa productivité en optimisant ses efforts de vente et en investissant dans la qualité de ses produits et services. Le développement de la concurrence oblige les entrepreneurs à se positionner clairement, à se spécialiser et à collaborer davantage avec d’autres prestataires.

Depuis 40 ans, le nombre d’établissements hôteliers a baissé de près de 1 % chaque année. En 2015, la branche comptait encore quelque 5000 établissements. Le nombre de lits proposés a, par contre, pu être maintenu. On se dirige donc vers des établissements à plus forte capacité, une tendance surtout visible en ville.

Les mutations structurelles ne s’accomplissent, pourtant, que lentement dans l’arc alpin. Une des raisons principales réside dans le fait que les structures fragilisées sont de petite taille et gérées par leurs propriétaires. Faute de successeurs et de moyens nécessaires aux investissements, ces établissements n’ont d’autre solution que de rester sur le marché. Le plus souvent, ces efforts aboutissent à la faillite de l’entreprise.

En cas de reprise, le propriétaire devrait absolument disposer des moyens financiers nécessaires et d’un concept commercialisable. Malheureusement, ces règles fondamentales ne sont que très rarement respectées et les faillites en cascade ne sont pas rares.

Outre le franc fort, d’autres facteurs sont responsables de cette évolution. Citons le changement climatique (des hivers plus courts avec peu de neige), La pression sur les rendements qu’induit une présence accrue d’hôtes provenant de marchés émergents (Chine, Inde, etc.) ainsi que la tendance de plus en plus fréquente à des séjours brefs et citadins.

L’évolution toujours plus marquée vers une société de loisirs, le caractère unique des paysages dans un espace réduit et la diversité culturelle de la Suisse en font un pays de vacances par excellence. Ces atouts, alliés à la capacité entrepreneuriale, à la force d’innovation et à la qualité de la formation dans notre pays, promettent à l’hôtellerie et à ses hôtes des perspectives réjouissantes.

Proposition de citation: Christophe Hans (2016). Prise de position: L’hôtellerie suisse plie, mais ne cassera pas. La Vie économique, 25 juillet.