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Une politique basée sur des faits

Une politique basée sur des faits

Les statistiques montrent clairement que l’accord sur la libre circulation des personnes n’a pas entraîné de recul significatif de l’emploi ni de pression à la baisse sur les salaires des employés peu qualifiés en Suisse. (Image: Shutterstock)

En tant qu’économiste en chef de l’Union patronale suisse (UPS), je m’engage pour une politique basée sur des faits. L’importance des données statistiques est inestimable. Le débat en cours sur l’accord sur la libre circulation des personnes (ALCP) entre la Suisse et l’Union européenne (UE) en est la meilleure illustration : la main-d’œuvre en provenance de l’étranger chasse-t-elle la main-d’œuvre locale du marché du travail, comme le clament les auteurs de l’initiative de résiliation ? Les statistiques montrent clairement que l’ALCP n’a pas entraîné de recul significatif de l’emploi ni de pression à la baisse sur les salaires des employés peu qualifiés en Suisse.

Autre exemple : la numérisation. Contrairement à de nombreuses craintes, elle a permis une forte progression de l’emploi en Suisse. La structure du marché du travail s’est modifiée : le secteur tertiaire a fortement gagné en importance par rapport au secondaire, ce qui a aiguisé la demande de main-d’œuvre qualifiée. Mais tandis que l’offre de postes de travail augmente, le recul de l’offre de main-d’œuvre s’accentue du fait du vieillissement de la population. Pour les entreprises établies en Suisse, la question de savoir où et avec quels efforts elles peuvent engager leurs spécialistes se pose avec toujours plus d’acuité.

L’immigration est indispensable


Pour contrer la raréfaction de la main-d’œuvre, il s’agit d’abord de mieux exploiter le potentiel de main-d’œuvre en Suisse. Même si les chiffres de l’Office fédéral de la statistique (OFS) montrent que le réservoir est vaste, il est illusoire de prétendre que l’économie suisse, avec ses nombreuses entreprises innovantes, peut se passer de l’immigration. Elle doit au contraire rester ouverte à la main-d’œuvre venant de l’UE et des États tiers. Si cet accès venait à être coupé, des entreprises se retrouveraient sous la menace d’une pénurie existentielle de main-d’œuvre. Elles quitteraient le pays en emportant leurs emplois avec elles. Cette perte de prospérité porterait durablement atteinte à la place économique et scientifique suisse.

L’expérience montre que le système de la libre circulation des personnes, couplé aux mesures d’accompagnement, est parfaitement adapté pour réguler l’immigration en Suisse et répondre sur mesure à la demande des entreprises. Une grande partie de la population profite ainsi des avantages de l’ouverture du marché.

Des réglages importants sont toutefois nécessaires afin de garantir l’accès au marché du travail à toutes les personnes actives en Suisse. Des estimations de l’OFS soulignent un potentiel élevé de main-d’œuvre, en particulier chez les femmes et les personnes plus âgées. On sait depuis longtemps qu’il est urgent et efficace de prendre des mesures à ce niveau. L’Union patronale suisse traite ces thèmes avec une haute priorité. Les mesures favorables à une meilleure conciliation entre travail et famille et à l’encouragement précoce sont économiquement très utiles, notamment parce que tout le monde est gagnant à long terme : les mères, leurs enfants, mais aussi l’économie et l’État.

Proposition de citation: Simon Wey (2019). Une politique basée sur des faits. La Vie économique, 14 novembre.