Bertrand Piccard, Président de la Fondation Solar Impulse, Lausanne
Il est nécessaire de jouer sur deux aspects fondamentaux afin de répondre à la crise environnementale : le progrès technologique et le cadre législatif. La technologie peut nous permettre de vivre mieux tout en polluant moins. Les avancées réalisées ces dernières années sont extraordinaires. L’efficience des panneaux photovoltaïques a augmenté en même temps que leur coût a diminué ; la capacité de stockage des batteries a décuplé, alors que l’autonomie des véhicules électriques, les nouveaux matériaux et le recyclage connaissent un essor important.
Pourtant, même si la technologie existe, le problème est toujours là : l’adoption des solutions reste trop lente. Cela tient notamment à la difficulté de changer les comportements, mais également au cadre législatif. Basé sur des technologies désuètes et inefficientes, celui-ci permet encore trop souvent de polluer. Car si la technologie connaît une vitesse d’évolution exponentielle, les réformes législatives et leur mise en œuvre ne peuvent progresser au même rythme. Il en résulte un cadre légal archaïque que nous devons moderniser.
En effet, de nombreuses lois et réglementations environnementales datent encore du siècle dernier : on pensait alors les ressources planétaires infinies, et l’utilisation du charbon et du pétrole était la norme. Or, la technologie n’a cessé d’évoluer depuis lors. Le cadre législatif nous bloque dans l’utilisation de technologies du passé, alors même qu’il devrait nous pousser à utiliser celles qui existent aujourd’hui, plus efficientes et plus propres.
Des réglementations profitables
Seule une modernisation des normes environnementales est aujourd’hui à même de transformer l’économie à la vitesse qu’impose l’urgence climatique. Convaincre chaque acteur économique d’utiliser les technologies propres, efficientes et rentables à sa disposition est nécessaire. Nous devons toutefois aussi moderniser le cadre juridique de manière à rendre leur utilisation non seulement souhaitable, mais obligatoire.
Des normes environnementales plus strictes sont nécessaires, car elles stimuleraient le besoin de solutions propres et efficientes, et donc une forte demande. Cela permettrait de tirer ces technologies sur le marché et de favoriser le développement de nombreuses jeunes pousses dans ce domaine. Le durcissement des lois sur l’utilisation des plastiques à usage unique a par exemple incité les consommateurs à se tourner vers des alternatives, qui sont en plein essor.
En établissant la rentabilité de plus de 1000 technologies qui protègent l’environnement, la démarche de la Fondation Solar Impulse a été de montrer que la modernisation du cadre législatif et réglementaire n’est pas un coût supplémentaire pour les citoyens et les entreprises : elle augmenterait au contraire les profits des entreprises et créerait des emplois.
Proposition de citation: Piccard, Bertrand (2021). L’avenir passe par la réglementation. La Vie économique, 02. juillet.