Les cellules lithium-ion sont également utilisées dans les batteries de vélos électriques. Photo prise dans l’entreprise MES Accufit à Lenzbourg (AG). (Image: Keystone)
L’interdiction prochaine des moteurs à combustion[1] dans l’Union européenne (UE) stimule la demande de véhicules électriques et, partant, de batteries nécessaires à leur propulsion. Ces accumulateurs sont rechargés avec de l’électricité provenant de l’énergie éolienne et solaire qui n’est pas forcément produite pendant les pics de consommation. L’électricité doit donc être temporairement stockée, notamment à l’aide de batteries combinées avec des systèmes photovoltaïques. Ces unités de stockage intermédiaire sont plus efficaces et plus dynamiques que les solutions de stockage mécaniques comme les centrales de pompage-turbinage, surtout lorsqu’ils sont utilisés sur le lieu de production de l’électricité. Les experts estiment qu’à long terme, environ 70% des installations photovoltaïques seront combinées avec des systèmes de stockage par batterie.
Une gestion durable est de rigueur
Bien que différents types de batteries remplissent cette fonction de stockage, les accumulateurs lithium-ion sont les plus couramment utilisés en raison de leur grande densité énergétique. À court et moyen terme, ils serviront pour les batteries de traction dans le domaine des transports et permettront aux ménages de stocker l’énergie photovoltaïque excédentaire. Bien que la technologie du lithium-ion remonte déjà aux années 1970, elle recèle encore un potentiel certain d’innovation. Son coût de production a ainsi été réduit de 15 à 18% par an en moyenne ces quinze dernières années. Il est estimé aujourd’hui à 100 USD/kWh et pourrait encore baisser pour atteindre 70 USD/kWh d’ici 2030 (voir illustration 1). Le volume d’énergie nécessaire à la production des batteries lithium-ion a également été diminué dans le même ordre de grandeur, ce qui contribue à réduire leur empreinte écologique.
Pour réussir la transition des moteurs à énergies fossiles vers les moteurs électriques et, donc, la décarbonisation du secteur des transports, il faut non seulement réduire les coûts de production des batteries, mais aussi les fabriquer de manière plus durable. Cette nouvelle approche est due notamment aux multiples critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (critères dits «ESG») qu’il faut observer et au tournant mondial donné à la politique climatique. Par ailleurs, l’industrie des batteries devrait se «démondialiser» ces prochaines années, car les pays industrialisés développent leur approvisionnement en matières premières et leurs propres capacités de production de batteries afin d’atteindre leurs objectifs en matière de sécurité énergétique[2]. La Suisse tente notamment de s’imposer comme fournisseur de choix dans ce nouveau secteur industriel.
Quelque 5,38 millions de batteries devraient arriver en fin de vie en 2040 dans l’Union européenne ainsi qu’en Islande, en Norvège et en Suisse). Le nombre croissant de véhicules électriques sur les routes entraîne une augmentation du nombre de batteries à éliminer, à recycler ou à réutiliser. Or, il n’existe pas encore de solution économique et écologique à ce problème.
Coût moyen d’une batterie d’accumulateurs lithium-ion, corrigé de l’inflation (2010-2020)
Source: Bloomberg / La Vie économique
Le plan d’action de l’Europe
À la fin de l’année 2020, l’UE a présenté une proposition de règlement relatif aux batteries et aux déchets de batteries visant à moderniser son cadre législatif sur les batteries dans le but d’assurer la compétitivité d’une chaîne de valeur durable pour les batteries en Europe. Cette proposition est intégrée dans le pacte vert pour l’Europe, le nouveau plan d’action pour une économie circulaire et la nouvelle stratégie industrielle pour l’Europe[3].
L’Alliance mondiale pour les batteries (Global Battery Alliance, GBA) et l’UE soutiennent le «passeport batterie» qui permettra aux consommateurs de savoir quels accumulateurs sont utilisés dans leur véhicule et les appareils qu’ils utilisent et comment ils ont été fabriqués. Le «passeport batterie» établira des normes et créera de la transparence, tout en soutenant au fil du temps les progrès accomplis par l’ensemble du secteur.
Les perspectives en Suisse
Plusieurs projets visant à améliorer l’écobilan des batteries lithium-ion sont menés actuellement en Suisse. Innosuisse, l’Agence pour la promotion de l’innovation, a notamment lancé CircuBAT dans le cadre de son Initiative Flagship. Au total, ce sont sept instituts de recherche suisses et 24 entreprises qui participent à ce projet sous la direction générale de la Haute école spécialisée bernoise (BFH). De 2022 à 2026, les participants développeront des solutions améliorant le bilan écologique de la mobilité électrique, dans le but d’établir un modèle d’affaires circulaire pour les batteries lithium-ion. A cet effet, ils cherchent des solutions plus durables applicables aux différentes phases du cycle de vie des batteries – pas seulement lors du recyclage.
CircuBAT compte en outre sept sous-projets qui se concentrent sur des solutions permettant de prolonger la durée de vie des batteries. À cette fin, les participants examinent de nouvelles méthodes de charge et décharge, par exemple la réutilisation des batteries de véhicules comme accumulateurs d’énergie stationnaires pour les centrales éoliennes ou solaires. D’autres sous-projets s’intéressent à de nouveaux matériaux et procédés de fabrication des batteries qui seraient également appropriés au recyclage. Il s’agit notamment d’automatiser le démontage des batteries pour récupérer leurs composants. Par ailleurs, les chercheurs étudient les conditions-cadre socio-économiques afin de développer de nouveaux modèles commerciaux pour les batteries lithium-ion dans le cadre d’une économie circulaire. Ce projet apporte ainsi une contribution importante à la décarbonisation des transports en Suisse et à l’utilisation des énergies renouvelables.
- Voir aussi Mock P. (2022) UE: cap sur la mobilité électrique. La Vie économique, 25 octobre. []
- Adam Jonas et autres (2021). []
- K. Berger, J.-P. Schöggl, et R. J. Baumgartner (2022). []
Bibliographie
- Adam Jonas et al. (2021). The New Oil: Investment – Implications of the Global Battery Economy. Stanley Research Bluepaper.
- Berger et al. (2022). Digital battery passports to enable circular and sustainable value chains: conceptualization and use cases. J. Clean. Prod., vol. 353, 131492, Jun.
Bibliographie
- Adam Jonas et al. (2021). The New Oil: Investment – Implications of the Global Battery Economy. Stanley Research Bluepaper.
- Berger et al. (2022). Digital battery passports to enable circular and sustainable value chains: conceptualization and use cases. J. Clean. Prod., vol. 353, 131492, Jun.
Proposition de citation: Vezzini, Andrea (2022). À quand la batterie parfaite? La Vie économique, 25. octobre.