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Forte progression des plaintes relatives aux appels publicitaires non sollicités en 2014

Le Seco a enregistré une forte hausse des plaintes concernant les appels publicitaires non sollicités. Il est toutefois difficile pour les autorités d’en appréhender les auteurs, en raison de la complexité des intrications mondiales.

Forte progression des plaintes relatives aux appels publicitaires non sollicités en 2014

En 2014, le nombre de plaintes pour des pratiques commerciales déloyales a plus que doublé par rapport à l’année précédente. Au total, 13 235 personnes se sont adressées au Secrétariat d’État à l’économie (Seco) pour dénoncer de tels agissements, contre 5830 seulement l’année précédente. Cette forte progression est la conséquence de la révision de la loi fédérale contre la concurrence déloyale (LCD), effectuée en 2012, qui confère davantage de compétences au Seco. Ce dernier ne pouvait, jusque-là, déposer de plainte pour concurrence déloyale que dans les litiges transfrontaliers. Désormais, il a la capacité d’intervenir aussi sur le plan intérieur[1].
Les plaintes concernant des appels publicitaires non sollicités se sont taillé la part du lion l’an dernier avec 11 502 réclamations, contre 355 pour la vente par correspondance et 275 pour les arnaques à l’annuaire (voir tableau 1). Sur le nombre total de réclamations, 12 407 émanaient de consommateurs et 828 d’entreprises. Seules 167 provenaient de l’étranger (voir illustration 1).

Objet des réclamations 2014




















Appels publicitaires, malgré l’astérisque 11 502
Non spécifié 377
Vente par correspondance 355
Arnaques à l’annuaire 275
Pollupostage (“spamming”) 273
Appels publicitaires, sans l’astérisque 190
Promesses de gain mensongères 107
Excursions/manifestations publicitaires 37
Arnaques sur Internet 36
Faux renseignements, dissimulation de faits 23
Clauses abusives 21
Systèmes boule de neige 18
Ésotérisme 13
Santé 4
Investissements 3
Crédit à la consommation 1
Total 13 235


Source: SECO / La Vie économique

Provenance des réclamations adressées au Seco




Source: SECO / La Vie économique

Remarque: les chiffres apparaissent en déplaçant le curseur.  

Les plaintes pénales pour appels publicitaires non sollicités aboutissent souvent à un échec


Ayant reçu une mise en demeure, 41 entreprises se sont engagées par une déclaration écrite contraignante à cesser la pratique commerciale déloyale incriminée. La plupart des avertissements visaient des boutiques en ligne, des sociétés de vente par correspondance, des centres d’appels ou des entreprises de télémarketing et de télécommunication.
Dans 69 cas, le Seco a déposé une plainte pénale auprès du ministère public cantonal compétent et, dans un cas, il a engagé une action civile devant le Tribunal de commerce du canton de Zurich. Au total, 24 dossiers ont donné lieu à des condamnations pénales. Dans quatorze affaires de ce type, les ministères publics ont pris une décision de non-entrée en matière, de classement ou de suspension. Ce nombre considérable s’explique par le fait que les autorités pénales rencontrent beaucoup de difficultés pour appréhender les responsables d’appels publicitaires non sollicités.

Les arnaqueurs à l’annuaire et opérateurs par présélection rappelés à l’ordre


Le Seco a enregistré deux succès dans le cadre de procédures civiles qui étaient pendantes devant les tribunaux de commerce des cantons de Berne et de Zurich. Dans le premier cas, un arnaqueur à l’annuaire envoyait à des entreprises des factures dissimulant une offre d’inscription. Cela donnait à penser qu’un contrat avait déjà été conclu en vue de figurer dans un répertoire professionnel. En réalité, le contrat ne devenait effectif qu’une fois la facture acquittée.
Juste avant l’audience principale, l’entreprise concernée a déposé une déclaration en cessation complète. Elle s’est engagée, en particulier, à ne plus envoyer de factures avant la conclusion d’un contrat et à assumer l’entier des frais de procédure. Dans ces circonstances, le Seco a retiré son action civile fin janvier 2014.
Dans le cas zurichois, le Seco a engagé une action contre un opérateur par présélection. On entend par là une entreprise qui propose, tout en utilisant le raccordement de Swisscom, des prestations en matière de téléphonie fixe. Dans ce cadre, les frais de 25,35 francs doivent être payés à Swisscom au titre du raccordement, tandis que l’opérateur facture les appels téléphoniques passés en utilisant la méthode par présélection.
Faisant fi de l’astérisque placé dans l’annuaire téléphonique, l’opérateur par présélection incriminé procédait à des appels publicitaires non sollicités afin d’élargir sa clientèle. En outre, les appelants prétendaient représenter Swisscom, puis proposaient à leurs interlocuteurs des conditions qui leur étaient plus favorables. Fin août 2014, le Seco et l’entreprise concernée ont conclu une convention devant le Tribunal de commerce de Zurich. L’opérateur par présélection s’engageait désormais à tenir compte de l’astérisque dans l’annuaire téléphonique et à indiquer sans la moindre ambiguïté qu’il appelle en son nom propre, sans que Swisscom ne soit impliqué.

Les appels publicitaires non sollicités et la mondialisation


Il est souvent difficile de traduire en justice les auteurs d’appels publicitaires non sollicités, comme l’a montré un autre cas dans le canton de Berne, d’où une entreprise lançait ce type d’appels sans respecter l’astérisque. Le Seco a porté plainte contre X concernant quatre numéros d’appel comportant l’indicatif 031. Après s’être adressé au service Surveillance de la correspondance par poste et télécommunication[2], le Ministère public du canton de Berne a appris que ces quatre numéros appartenaient à un bloc de 10 000 numéros[3] attribués par l’Office fédéral de la communication (Ofcom) à une entreprise basée en Belgique. La loi sur les télécommunications en vigueur n’exige pas qu’un fournisseur de services de télécommunication ait son siège sur notre territoire pour que l’Ofcom lui attribue des numéros de téléphone suisses par blocs de 10 000. L’indication d’une adresse postale suisse est suffisante pour répondre aux exigences légales.
Les autres enquêtes effectuées par le Ministère public ont montré que les numéros incriminés avaient été cédés à d’autres entités aux États-Unis, en Grande-Bretagne et en Irlande. De là, elles avaient été revendues à des entreprises sises en Serbie et en Bosnie. Pour être en mesure d’appréhender les auteurs de ces agissements, le Ministère public aurait dû présenter aux autorités compétentes, dans la langue correspondante, une demande d’entraide judiciaire internationale. La charge administrative que cela implique étant sans commune mesure avec la gravité et l’importance des faits reprochés, il a suspendu la procédure pénale.
Les autorités pénales sont confrontées à deux problèmes de taille: la cession de numéros de téléphone suisses à l’étranger et la pratique dite du «spoofing». Cette dernière consiste, pour un appelant, à dissimuler sa véritable identité en faisant apparaître sur l’afficheur un faux numéro de téléphone. Le numéro usurpé ne pouvant être attribué à personne, l’appelant jouit d’une quasi-impunité.

La révision du droit des télécommunications apporte des embryons de solution


L’automne passé, le Conseil fédéral a procédé à un état des lieux du démarchage téléphonique effectué depuis l’étranger au travers de numéros suisses, vrais ou faux. Selon son rapport, il faut que le Seco puisse s’enquérir, auprès du service Surveillance de la correspondance par poste et télécommunication, de l’identité d’une entreprise qui pratique anonymement le démarchage par téléphone[4]. C’est ce que prévoit la révision en cours de la loi fédérale sur la surveillance de la correspondance par poste et télécommunication (LSCPT).
Malheureusement, cela ne changera rien au problème que constitue la cession de numéros de téléphone suisses à l’étranger. C’est pourquoi le Conseil fédéral demande que d’autres solutions soient explorées dans le cadre de la révision du droit des télécommunications. Certaines mesures de filtrage pourraient constituer une piste. Par ailleurs, le rapport voudrait que les centres d’appel soient obligés de s’inscrire et de s’identifier. Leur numéro devrait figurer dans l’annuaire téléphonique et il faudrait avoir la possibilité de les rappeler.

  1. Concernant l’extension du droit du SECO d’intenter une action, v. La Vie économique 5-2013, p. 43 ss., et 5-2014, p. 41 ss. []
  2. Le service exécute ses tâches en faveur des autorités de poursuite pénale de manière autonome et n’est pas assujetti à des instructions. Sur le plan administratif, il est subordonné au Centre de services informatiques du Département fédéral de justice et police (CSI-DFJP). []
  3. Les numéros de téléphonie fixe suisses (numéros comportant un indicatif géographique, le 031 p. ex.) sont attribués par l’Ofcom par blocs de 10 000 à des entreprises (ou à des fournisseurs de services de télécommunication) souhaitant proposer en Suisse des services de télécommunication. []
  4. Voir le Rapport 2014 sur les télécommunications, daté du 19 novembre 2014 (www.bakom.admin.ch/dokumentation/gesetzgebung/00512/03498/index.html?lang=fr) et article de La Vie économique 5-2013, p. 44. []

Proposition de citation: Philippe Barman (2015). Forte progression des plaintes relatives aux appels publicitaires non sollicités en 2014. La Vie économique, 22 mai.

Se préserver des appels publicitaires non sollicités

Le Seco a conçu une brochure contenant de précieux conseils permettant de minimiser les nuisances du démarchage téléphonique. Vous la trouverez sur le site du Seco: www.seco.admin.ch