
Saskia Schenker, Directrice de Prio Swiss, l’Association des assureurs-maladie suisses, Berne
C’est aux cantons qu’il incombe d’organiser les réseaux de soins hospitaliers de demain, la loi fédérale sur l’assurance-maladie (Lamal) leur imposant des directives claires, valables dans toute la Suisse. Les cantons sont ainsi chargés de concevoir une offre stationnaire qui réponde aux besoins de la population, tout en étant de qualité élevée et économiquement viable. L’offre hospitalière doit en outre être conçue de façon à éviter les surcapacités, fournir des prestations médicales de manière aussi coordonnée et concentrée que possible, garantir la qualité des soins et limiter la hausse des coûts.
Toutefois, la réalité du paysage hospitalier est souvent bien différente: les offres stationnaires ne sont guère coordonnées au niveau intercantonal, alors que la Suisse compte un grand nombre d’hôpitaux qui proposent souvent les mêmes prestations dans un périmètre limité, selon le principe «chaque établissement fait à peu près tout». Ces capacités inefficaces et sous-exploitées créent de mauvaises incitations et sont coûteuses; pire encore, elles menacent la qualité des soins car de nombreux hôpitaux n’atteignent pas le nombre minimum de cas recommandés pour les opérations spécialisées par la Conférence suisse des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS), ou ils ne l’atteignent que par le biais de coopérations. Il est grand temps que les cantons abordent ensemble la planification hospitalière. Étant donné que les patientes et les patients ne tiennent pas compte des frontières cantonales lorsqu’ils choisissent un hôpital, les cantons doivent intégrer les flux intercantonaux de patients dans leur planification hospitalière, en déterminant conjointement le lieu d’implantation des différentes spécialités.
Il est grand temps que les cantons abordent ensemble la planification hospitalière.
Les intérêts régionaux empêchent souvent la mise en œuvre de solutions judicieuses, les cantons se préoccupant d’abord de leurs propres hôpitaux avant de réfléchir à ce qui serait le mieux pour l’ensemble du système de santé. Il ne suffit plus de demander à un canton voisin s’il accepte une décision, il faut une vraie volonté de coopérer. En charge de la planification hospitalière, les cantons doivent voir une opportunité dans la coopération intercantonale, la spécialisation ainsi que l’amélioration de la qualité et de la rentabilité.
Les assureurs-maladies peuvent eux aussi contribuer à une meilleure planification hospitalière, puisque, depuis 2024, la Lamal leur permet d’apporter leur expertise dans le cadre de procédures de consultation. Si des intérêts de politique régionale font obstacles à de bonnes solutions, il leur reste, en dernier ressort, le droit de recours.
Le dialogue et le partenariat entre les cantons, les hôpitaux et les assureurs sont les facteurs essentiels d’une planification hospitalière réussie. La population ayant accepté, le 24 novembre 2024, le financement uniforme des prestations ambulatoires et stationnaires, la compréhension mutuelle et la collaboration entre les différents acteurs devraient s’en trouver améliorées.
Si elle est mise en œuvre rigoureusement selon les prescriptions légales, la planification hospitalière contribuera à un système de santé de meilleure qualité, plus économique et financièrement supportable pour les personnes assurées.
Proposition de citation: Schenker, Saskia (2025). Mieux organiser notre système hospitalier. La Vie économique, 09 septembre.